Lundi 12 décembre 2022 au Parlement européen (Strasbourg). Anne-Sophie Pelletier, députée européenne de La France insoumise (LFI) et de la Gauche européenne, présente son rapport " vers l'égalité des droits pour les personnes en situation de handicap ". Devant l'assemblée clairsemée, elle commence à discourir en langue des signes française (LSF), avant d'être interrompue au bout d'une minute au motif que « la langue des signes n'est pas la langue officielle du Parlement européen ». « Etre interrompue parce qu'incomprise : tout un symbole. Pour de nombreuses personnes en situation de handicap, l'exclusion c'est leur quotidien. Cela doit cesser », s'est alors indignée la députée française. Avant de poursuivre à l'oral : « De nombreuses personnes en situation de handicap en Europe sont discriminées, l'accessibilité au travail et aux droits fondamentaux est encore loin d'être aboutie ». Si son allocution en LSF a été tuée dans l'œuf, son rapport a quasiment fait l'unanimité dans l'hémicycle strasbourgeois, lors du vote, le 13 décembre 2022. 526 voix pour, 10 contre et 83 abstentions sur 619 votants.
« Un progrès vers une réelle égalité pour tous »
Rédigé sur la base de la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes en situation de handicap, de concert avec le Forum européen des personnes handicapées, ce texte « invite les Etats membres à veiller à ce que les personnes handicapées bénéficient de chances égales sur le marché du travail, de l'accès à une éducation inclusive en milieu ordinaire et à des services de santé ainsi que de l'égalité d'accès aux transports, en éliminant les obstacles fondamentaux à la vie sociale et en intégrant les principes de conception universelle dans les infrastructures et les investissements numériques dans toute l'Union ». « Pendant trop longtemps, les difficultés des personnes handicapées ont été ignorées au sein de l'Union européenne (UE). Ce sont des citoyens dont les droits sont violés au quotidien. Il est grand temps que cela change, et je me réjouis que le débat sur ce rapport puisse marquer un progrès vers une réelle égalité pour tous », s'est félicitée Anne-Sophie Pelletier, aide-soignante en EHPAD de profession et investie sur les questions d'autonomie.
91 propositions
Bien que très complet et abordant des sujets tous azimuts, ce texte n'est pas législatif et ne contraint donc pas les Etats membres à adopter les mesures qui y figurent. Il s'agit plutôt d'un listing de recommandations, du champ de la santé, en passant par l'emploi, l'accessibilité numérique, la carte européenne d'invalidité ou encore les droits liés à la sexualité (article en lien ci-dessous). Si rien ne prédit que les 27 adopteront de nouvelles dispositions pérennes, ce document, en 91 propositions, donne « une bonne base de travail pour les associations et les ONG investies dans le domaine du handicap, qui pourront ensuite peser sur les autorités locales, précise le cabinet de la députée. Ces objectifs sont ambitieux et nous pouvons aller encore plus loin ». Le document recommande ainsi de décloisonner « les projets fructueux relatifs à l'inclusion des personnes handicapées dans tous les domaines » et d'instaurer des échanges de bonnes pratiques au niveau européen. Il prend position pour une meilleure accessibilité de la justice, pour fluidifier les « mécanismes de plainte, tant judiciaires que non judiciaires » ; argue pour un meilleur traitement des détenus et une amélioration de l'accessibilité du système judiciaire ; promeut des « environnements numériques accessibles à tous », avec un sous-titrage en direct et des informations faciles à lire et à comprendre.
Réforme de la carte européenne d'invalidité
Sur le plan de la santé, le rapport « prie la Commission et les Etats membres de prendre rapidement des mesures pour veiller à ce que les personnes handicapées, y compris celles souffrant de handicaps psychosociaux, bénéficient de soins de santé et de programmes gratuits ou abordables aussi diversifiés » (article en lien ci-dessous). Enfin, en matière de mobilité, une attention toute particulière est accordée à la carte européenne d'invalidité, utilisée pour rappel dans seulement huit Etats de l'UE (article en lien ci-dessous) et qui devrait être « réformée », selon Anne-Sophie Pelletier. « Celle-ci devrait également, par défaut, être utilisable pour les services publics nationaux, régionaux et locaux, tels que les transports, être combinée à un site web spécial de l'Union et à une base de données accessible en ligne dans toutes les langues de l'Union », est-il précisé dans le texte.