"Aide à mourir" : des personnes handicapées alertent

"Un pistolet sur ma table de nuit" : des collectifs de personnes handicapées alertent sur la dangerosité du texte sur l'aide à mourir, soumis au vote des députés, alors qu'ils peinent à obtenir les moyens d'une vie digne.

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Patient en soins palliatifs à l’hôpital

"Un pistolet chargé déposé sur ma table de nuit": des collectifs de personnes handicapées alertent sur "l'extrême dangerosité" du texte instituant l'aide à mourir, soumis au vote des députés mardi, au moment où il leur est de plus en plus difficile d'obtenir les moyens d'une vie digne.

Lettre ouverte aux députés

Dans une "lettre ouverte" aux députés, le Front de gauche antivalidiste (FGA), soutenu par de nombreux collectifs de personnes handicapées - Jabs, CLHEE, Handi-Social, Les Dévalideuses, CLE Autistes...-, appelle les élus à ne pas voter la proposition de loi.

En quelques jours, cette lettre, publiée sur le site de Médiapart, qui appelle les députés de gauche à "ne pas trahir leurs valeurs", a réuni près de 2.000 signatures, a déclaré à l'AFP Elisa Rojas, militante antivalidiste (contre la discrimination envers les personnes vulnérables).

Rassemblement contre la proposition de loi

Dans une initiative distincte, quelque 300 personnes handicapées et leurs aidants se sont rassemblés samedi près de l'Assemblée nationale pour dénoncer les "dangers" de la proposition de loi sur l'aide à mourir.

Interrogé par l'AFP, le cabinet de la ministre de la santé Catherine Vautrin rappelle que "le handicap et l'âge ne sont pas des critères rendant éligible à l'aide à mourir".

Réponse des ministres

"Le droit de vivre dans la dignité est et restera le principe cardinal autour duquel s'articule l'accompagnement de la personne. Le droit de mourir dans la dignité ne l'entrave en rien", a par ailleurs affirmé la ministre de l'Autonomie et du Handicap, Charlotte Parmentier-Lecocq à l'AFP.

Témoignage d'une personne atteinte de la maladie de Parkinson

Pourtant, "cette loi me fait l'effet d'un pistolet chargé déposé sur ma table de nuit, afin que je mette fin à mes jours le jour où je me dirai que je suis un poids trop important pour mes proches ou que la société me dira que je coûte trop cher", a déclaré Edwige Moutou, 44 ans, atteinte de la maladie de Parkinson, au rassemblement samedi.

Impact sur les personnes handicapées

Même si la loi est présentée comme une réponse aux malades, elle concernera aussi les personnes handicapées, puisque beaucoup le sont en raison d'une maladie invalidante, chronique ou lourde, font valoir les collectifs des deux bords.

Critères d'éligibilité flous

Ils jugent flous et trop larges les critères d'éligibilité à l'aide à mourir, autre nom du suicide assisté et de l'euthanasie, retenus dans le texte.

Il prévoit la création d'un "droit à l'aide à mourir" pour les personnes atteintes "d'une affection grave et incurable" qui "engage le pronostic vital, en phase avancée" ou "terminale", et présentant "une souffrance physique ou psychologique constante".

Impact sur les maladies chroniques

"Ca peut englober des millions de personnes, notamment ceux en +affections longue durée+ (ALD): maladies chroniques ou neuro-dégénératives, comme l'insuffisance cardiaque terminale, la sclérose en plaque, ou des maladies psychiques", relève Magali Jeanteur, à l'origine du rassemblement samedi sous le mot d'ordre #JesuisÉligible.

Cette médecin généraliste a posté lundi dernier une vidéo sur le réseau social Linkedin à la demande de son mari atteint d'un locked-in syndrome, qui a été beaucoup partagée et lui a valu des dizaines de messages.

Impact sur les personnes en fin de vie

Le texte "est destiné aux personnes malades et handicapées dont la mort n'est ni imminente, ni proche, ni même prévisible, soit un nombre considérable de personnes", écrit le Front de gauche antivalidiste.

Ces personnes atteintes de maladies invalidantes seraient éligibles puisqu'il n'est plus nécessaire d'être en fin de vie, avec un pronostic vital engagé à court terme, pour avoir "droit à l'aide à mourir", relèvent-ils.

Difficultés de vivre dignement

Or pour beaucoup de personnes malades ou handicapées, vivre dignement relève déjà du combat: accès difficile aux soins, aides à domicile insuffisantes, pauvreté, isolement, relèvent-ils.

"Dans ce contexte, la possibilité de recourir au suicide assisté et à l'euthanasie, légalisés par le texte, pourrait devenir une issue par défaut plutôt qu'un libre choix de mourir, faute de pouvoir vivre dignement", ajoute Elisa Rojas.

Exemple du Canada

Dans les pays où le suicide assisté et l'euthanasie ont été légalisés, comme au Canada, ils ont été étendus peu à peu à de plus en plus de malades, indiquent-ils dans leur lettre ouverte.

© sittithat tangwitthayaphum de Getty Images

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