Conditions indignes : 2 détenus handicapés assignent l'Etat

Plus de personnel soignant après 17h, parloir en slip, nuisibles en cellule... 3 détenus à Toul, dont 2 handicapés, ont assigné l'Etat en justice, leur conseil dénonçant des conditions de détention "indignes" devant le tribunal administratif de Nancy

• Par
Un détenu tient les barreaux de sa cellule.

DERNIERE MINUTE DU 29 JANVIER 2025
Le tribunal administratif de Nancy a écarté, le 29 janvier 2025 la plupart des requêtes formulées par les trois détenus de Toul. Statuant en référé la procédure d'urgence, le tribunal a seulement estimé que, pour l'un des trois hommes, lourdement handicapé, l'assistance qui lui était apportée était "insuffisante sur différents points" et a enjoint l'administration pénitentiaire de prendre, dans un délai de 48 heures, des mesures pour remédier à ces carences.

Pouvoir se doucher et se lever 

Le juge réclame ainsi que le détenu soit "quotidiennement levé de son lit médicalisé", qu'il puisse bénéficier "de douches régulières", qu'il soit "vêtu décemment", et qu'il puisse "satisfaire dans des conditions normales ses besoins élémentaires". Mais les autres demandes des détenus, qui purgent de longues peines, ont toutes été rejetées...

Pas d'accompagnant supplémentaire

Sur l'accès aux soins, le juge des référés a estimé que les besoins d'une assistance assurée par une tierce personne étaient "satisfaits par la présence de soignants du service de soins infirmiers à domicile" et celle d'un détenu "disposant d'une qualification en tant qu'auxiliaire de vie" et employé comme tel par l'administration pénitentiaire.

Des mesures suffisantes contre les nuisibles

Sur la présence de cafards et autres punaises de lit dans leurs cellules, le magistrat a conclu que la preuve de l'existence de ces nuisibles n'était pas apportée pour deux des trois détenus. Pour le troisième, dont l'avocat avait justement apporté à l'audience une enveloppe contenant des cafards, le juge a estimé que des mesures suffisantes avaient été prises, rappelant notamment que le détenu s'était opposé en avril à l'intervention d'une société spécialisée dans sa cellule.

"Pas d'atteinte grave aux libertés fondamentales"

Concernant les autres griefs formulés par les prisonniers, notamment la pratique de fouilles intégrales, les atteintes à la confidentialité des échanges entre les détenus et leur avocat ou l'existence de menaces de la part du personnel de l'établissement, le tribunal a conclu qu'ils n'étaient "pas suffisamment établis" ou qu'ils étaient "insuffisants pour caractériser une atteinte grave à une liberté fondamentale".

À l'issue de cette procédure d'urgence qui aboutit à une décision provisoire, une nouvelle audience doit se tenir dans les mois qui viennent pour statuer sur le fond du dossier.

ARTICLE INITIAL DU 28 JANVIER 2025
A Toul, en Meurthe-et-Moselle, trois détenus, dont deux en situation de handicap, assignent l'Etat pour leurs conditions de détention "indignes" et "inconcevables".

Témoignages des proches et des codétenus

À l'audience, leur avocat Charly Salkazanov a cité différents témoignages des requérants, de certains de leurs codétenus ou de leurs familles leur rendant visite au parloir, évoquant des "traitements inhumains et dégradants" à l'encontre des trois hommes âgés entre une quarantaine et une soixantaine d'années et condamnés à des peines longues, qu'ils purgent à Toul. Il a notamment apporté une enveloppe kraft dans laquelle se trouve "un courrier de l'un des requérants, dans lequel il a envoyé des cafards, qu'il a tués lui-même" en détention, a-t-il regretté.

Moqueries, humiliations, manque d'accès aux soins...

L'un de ses clients, atteint selon plusieurs avis médicaux de la maladie de Charcot, en tout cas reconnu comme étant en situation de handicap, subit en détention selon lui des "carences dans l'accès aux soins et à la santé", avec seulement quelques séances de kinésithérapie "pas adaptées", loin des recommandations des médecins face à sa pathologie. Le deuxième, "invalide", "ne peut plus rien faire seul. Il est laissé nu, sur son lit, toute la journée" et même "amené en slip en parloir", comme l'a constaté en août 2024 son avocat, même si selon l'administration pénitentiaire, il s'agissait d'un short. Le dernier, pas reconnu handicapé mais qui se déplace difficilement en béquilles, subit des "moqueries" et souffre de "graves problèmes" liés à l'hygiène, selon son conseil.

Ordonnance rendue mardi ou mercredi

Un détenu, ayant obtenu un diplôme d'auxiliaire de vie et recruté par l'administration pénitentiaire, pourrait les aider en dehors des horaires de présence des personnels de santé. Mais ils refusent car l'homme est un "violeur multirécidiviste", selon M. Salkazanov. À l'audience, les représentants du ministère de la Justice ont déclaré que les détenus en ayant besoin bénéficiaient de soins, avec notamment la présence d'une aide à domicile chaque jour à leurs côtés, tout en précisant qu'en vertu du secret médical, le ministère de la Santé était responsable de ce suivi, et non l'administration pénitentiaire. Cette dernière a aussi précisé qu'une société intervenait pour éradiquer les nuisibles dans le centre de détention. Le juge des référés doit rendre son ordonnance "mardi ou mercredi".

© Science photo library / Canva

Partager sur :
  • LinkedIn
  • Facebook
  • Blue sky
  • Twitter
« Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© (2025) Agence France-Presse.Toutes les informations reproduites sur cette page sont protégées par des droits de propriété intellectuelle détenus par l'AFP. Par conséquent, aucune de ces informations ne peut être reproduite, modifiée, rediffusée, traduite, exploitée commercialement ou réutilisée de quelque manière que ce soit sans l'accord préalable écrit de l'AFP. L'AFP ne pourra être tenue pour responsable des délais, erreurs, omissions qui ne peuvent être exclus, ni des conséquences des actions ou transactions effectuées sur la base de ces informations ».
Commentaires0 Réagissez à cet article

Thèmes :

Rappel :

  • Merci de bien vouloir éviter les messages diffamatoires, insultants, tendancieux...
  • Pour les questions personnelles générales, prenez contact avec nos assistants
  • Avant d'être affiché, votre message devra être validé via un mail que vous recevrez.