40,4 milliards d'euros en 2021, c'est le montant des dépenses d'aide sociale des départements selon l'Observatoire national de l'action sociale (ODAS). Cela représente une progression de 150 millions d'euros, soit + 0,4 % par rapport à 2020. « Jamais les dépenses sociales des départements n'avaient si peu augmenté d'une année à l'autre », constate l'Odas en juin 2022, qui qualifie 2021 « d'année atypique ». « C'est d'autant plus surprenant que la crise sanitaire liée au Covid-19 a continué de perturber la vie sociale et économique du pays tout au long de l'année, malgré la mise en œuvre généralisée de la vaccination », poursuit l'Observatoire. Cette stabilisation intervient après une année 2020 marquée à l'inverse par une augmentation exceptionnelle de 4,2 % des dépenses, liées à des mesures d'urgence en réponse à la crise sanitaire.
+3,3 % pour le handicap
Si, en 2021, le RSA (Revenu de solidarité active) reste le premier poste de dépenses de l'action sociale départementale avec plus de 11 milliards d'euros alloués, l'augmentation la plus marquante est celle des dépenses liées au soutien aux personnes handicapées (+ 3,3 %) pour atteindre 8,3 milliards d'euros contre 8 milliards en 2020. Cela s'explique notamment par la mise en œuvre du « Ségur de la santé » qui a permis une revalorisation, dans un premier temps, de la rémunération des personnels médicaux et non médicaux des hôpitaux et des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) publics, avant d'étendre certaines mesures au secteur du handicap (article en lien ci-dessous).
PCH : évolution équivalente à 2020
La répartition des dépenses du secteur du handicap reste inchangée par rapport à 2020 (article en lien ci-dessous) : les deux tiers sont consacrés à l'hébergement et l'accueil de jour, le reste aux aides et allocations (l'allocation compensatrice pour tierce personne et la Prestation de compensation du handicap). Cette dernière a d'ailleurs augmenté de 5,8 %, une évolution équivalente à celle de l'année précédente qui s'explique par une hausse du nombre de bénéficiaires ayant des droits ouverts (+ 2 %) par rapport à 2020. L'autre source d'augmentation est l'extension de la PCH à l'aide à la parentalité (article complet en lien ci-dessous). Cette nouvelle prestation permet à un parent en situation de handicap de rémunérer un tiers pour l'aider à s'occuper de son enfant ou d'acheter du matériel spécifique adapté. Entrée en vigueur au 1er janvier 2021, la mise en œuvre de cette prestation par les départements a été progressive.
Côté hébergement ?
En ce qui concerne l'aide sociale à l'hébergement, on observe une faible augmentation du nombre de bénéficiaires (+ 1 %) par rapport à 2020, en corrélation avec la hausse de la dépense (+ 1,7 %). L'impact de la crise sanitaire a été très différent selon les départements, et l'estimation nationale couvre de fortes disparités. On peut en déduire qu'il n'y a plus, ou alors de moindre façon, de création ou d'extension d'établissements, au moins sous leur forme traditionnelle. L'accompagnement à domicile et l'habitat inclusif financés par la PCH constituent des alternatives en développement mais dont l'impact sur les dépenses reste peu appréhendable.
Et à l'avenir ?
Les statistiques de 2020 et de 2021 ne sont en rien représentatives des tendances futures. « L'inquiétude persiste, pour 2022 et plus encore pour 2023 », alerte l'Odas. En cause ? L'impact financier de la crise sanitaire sur les services et établissements sociaux et médico-sociaux, les diverses revalorisations salariales (aide à domicile, fonction publique territoriale, établissements et services), les évolutions réglementaires (application du tarif plancher dans le champ de l'aide à domicile et mise en œuvre de la loi de février 2022 relative à la protection de l'enfance) et, enfin, l'augmentation du prix des matières premières et de l'énergie, la hausse des taux d'intérêts et l'inflation provoquent à la fois une croissance des coûts des services et de la précarité de la population.
Pénuries de pro
En parallèle, les départements sont confrontés à des difficultés croissantes de recrutement à cause de la baisse d'attractivité des métiers des services à la personne. Les revalorisations salariales ne suffiront pas, « l'action sociale et médico-sociale est engagée dans une impasse », prévient l'Odas. « En effet, la prégnance de la réparation peut donner l'impression à ses acteurs qu'il s'agit de faire face à des besoins sans fin, un véritable 'tonneau des danaïdes', il en résulte du découragement et de la fuite », alerte-t-il. Il rappelle « l'urgence à redonner des perspectives aux professionnels », en « repensant l'action sociale et médico-sociale pour lui donner plus de sens ».