La justice a suspendu le 31 octobre 2014, pour raisons médicales la peine d'un détenu grabataire de 90 ans, incarcéré pour viol, au motif qu'elle constituait «un traitement inhumain», selon un jugement consulté par l'AFP. Incontinent, sourd, souffrant d'un glaucome, le condamné, en fauteuil roulant, est incapable de faire sa toilette et de s'habiller seul, selon ce jugement.
Avec l'aide de deux codétenus
Dans la maison d'arrêt d'Osny (Val-d'Oise) qui affiche un taux de surpopulation de 151%, le condamné ne bénéficiait d'aucune prise en charge spécifique, et ne pouvait compter que sur l'aide bénévole de deux codétenus pour ses tâches quotidiennes. Pour le juge de l'application des peines (JAP) de Pontoise (Val-d'Oise), l'incarcération du nonagénaire est «durablement incompatible» avec son état de santé, et constitue «un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'Homme». Le parquet a 10 jours pour faire appel de cette décision.
Des faits qu'il a toujours contestés
Incarcéré depuis 2006, le nonagénaire avait été condamné en 2008 par la cour d'assises d'appel des Yvelines à 14 ans de réclusion pour des viols et agressions sexuelles sur sa petite-fille alors mineure, entre 2000 et 2006. Son avocat, Me Tarek Koraitem, avait demandé la suspension de cette peine, devant s'achever en novembre 2016, pour que son client puisse finir ses jours chez son fils. Sa remise en liberté sera effective le 12 novembre 2014. L'expertise médicopsychologique avait conclu que le condamné ne présentait «aucune dangerosité au sens psychiatrique», et que le risque de réitération paraissait «infime».
«Le seuil de l'acceptable dépassé»
«Le seuil de l'acceptable est dépassé» avait assuré le directeur de l'établissement, admettant ne plus avoir «les moyens de prendre en charge le condamné avec un minimum de dignité et de sécurité». La loi Kouchner de 2002 permet aux détenus atteints de pathologies graves de bénéficier d'une suspension de peine pour être soignés et mourir dans la dignité. Selon la Chancellerie, 880 suspensions de peine pour raisons médicales ont été accordées entre 2009 et 2013. Le détenu le plus âgé de France, Marcel Guillot, 93 ans, a été condamné en mars à dix ans de réclusion criminelle pour avoir tué une octogénaire par dépit amoureux.