Des ouvrages « non recommandés » sur la toute nouvelle plateforme documentaire consacrée à l'autisme ? DOCautisme, mise en ligne en janvier 2022, propose une compilation des ressources issues des différents CRA (centres de ressources autisme) français (article complet en lien ci-dessous). Or, contre toute attente pour cette bibliothèque de référence qui se définit comme « inédite dans le monde francophone, sans réel équivalent en Europe », certaines archives ne sont pas en adéquation avec les recommandations de bonnes pratiques professionnelles (RBPP) éditées par la Haute autorité de santé (HAS).
La psychanalyse de trop !
Parmi les 14 000 ouvrages, thèses, doc et jeux, certains viennent jouer les trouble-fête. Autisme France a fait les comptes : 399 références sur la psychanalyse et 47 sur la psychothérapie institutionnelle, des approches unanimement décriées, même si, dans les faits, elles continuent d'être utilisées et enseignées par certains praticiens en 2022 (article en lien ci-dessous). Leur présence est un outrage de trop. C'est ce que dénoncent plusieurs associations, qui redoutent la « confusion » et crient à la « désinformation ». Autisme France dit avoir « demandé depuis le début des travaux sur ce portail que ces documents figurent avec une mise en garde ». Et puis, rien !
Un onglet « Attention danger »
Le GNCRA (Groupement national des centres de ressource autisme), qui porte ce projet, considère que, pour « permettre aux utilisateurs d'avoir un prisme historique et évolutif » du champ de l'autisme, ces documents ne doivent pas être « brûlés ». Dans ce cas, pour éviter l'autodafé ou le déboulonnage d'un pan de notre « histoire », ne devraient-ils pas être identifiés par un message « Attention danger » ? Car même si le site prévient qu'ils « sont réservés au lecteur averti et doivent être abordés avec un esprit critique », cette base est accessible à tous, y compris aux familles nouvellement confrontées à l'autisme qui n'ont certainement pas les connaissances suffisantes pour faire la part des choses. « On ne peut pas dire aux gens : 'On met tout en ligne et débrouillez-vous' », déplore à son tour l'association Bleu network, plateforme nationale spécialisée dans l'accompagnement et l'accès à l'emploi des personnes autistes.
Un effet pervers
Pour l'association PAARI (Personnes autistes pour une auto-détermination responsable et innovante), il n'était pas utile « d'investir autant de temps, d'énergie, et sans doute d'argent, si c'est pour produire un énième moteur de recherche sans tri préalable qui n'apporte rien par rapport à l'existant ». Elle dénonce même « l'effet pervers » puisque « sur les bases de données publiques, l'utilisateur est conscient qu'il doit lui-même exercer ce tri ». Or, ici, il « va s'attendre à trouver des contenus fiables », d'où la nécessité de les faire valider par une « équipe formée aux RBPP et vigilante ». Si les services du GNCRA n'ont pas les « compétences ou les personnels pour réaliser un tri », il « apparaît alors sage de réduire cette base documentaire », insiste l'association, qui appelle à « fixer une ligne éditoriale dans tous les centres de référence ». Selon Bleu network, « la stratégie nationale, dont le premier pilier est de remettre la science au cœur de la recherche pour définitivement sortir de l'obédience psychanalytique qui a assommé l'autisme, doit être respectée ».
Réaction du GNCRA
Face à l'exaspération, le GNCRA a tenu à réagir dans un communiqué. Tout en affirmant, qu'avec le réseau des CRA, il « défend et promeut les bonnes pratiques », il dit comprendre l'« émoi ». Pour éviter tout risque de consultation de documents inadaptés, il assure vouloir mettre en œuvre certaines mesures, « le plus rapidement possible », promettant notamment un système « d'alerte » sur les références incriminées. Enfin, il veut créer un « Comité des utilisateurs DOCautisme dans une volonté d'améliorer et d'optimiser la base documentaire ». Un formulaire de contact (en lien ci-dessous) invite les internautes à déposer leurs remarques ; une démarche tout à fait « recommandée » !