Le bas du ventre ensanglanté, l'abdomen lacéré, le visage marqué... Le modèle, Rachel Berwick, une jeune Britannique de 28 ans, expose les plaies béantes qui tapissent son corps et son esprit depuis l'adolescence. Une vision qui fait froid dans le dos. C'est pourtant le quotidien de nombreuses femmes qui souffrent d'endométriose, mis en lumière par Andrea Baines, une maquilleuse de 34 ans qui lutte, elle aussi, contre les crampes pelviennes et lombaires, la fatigue, les troubles digestifs... Le temps d'un shooting photo, elle troque son blush pailleté pour du fard violacé et envoie valser les tabous qui planent sur les maladies gynécologiques. L'objectif ? « Transmettre la douleur de vivre avec l'endométriose, les cicatrices que l'on ne voit pas, l'agonie d'un mal invisible ».
Les « endogirls », ces guerrières
Chez celles que l'on surnomme les « endogirls », le tissu recouvrant l'endomètre se développe hors de l'utérus et provoque des lésions, des adhérences et parfois des kystes dans les organes colonisés. A l'intérieur, cela se traduit par « une aiguille chaude et tranchante qui se gratte contre mes organes internes, comme si mes entrailles étaient arrachées », décrit Rachel. Face à l'objectif de la photographe Emma Wilson, elle pose tantôt abattue, tantôt « guerrière ». C'est d'ailleurs ce nom, « Warrior », qu'elle a choisi pour cette série. Cette ambivalence reflète le quotidien des femmes concernées, qui doivent sans cesse masquer leurs maux et faire « bonne figure ».
Souffrance émotionnelle
« Le fait que [la maladie] soit invisible est difficile à gérer, parce que les gens pensent qu'on va bien », explique Andrea Baines, avant de confier que certains professionnels de santé l'ont déjà prise pour une « menteuse », une simulatrice. « Certains médecins sont vraiment en retard et ne croient pas à l'étendue de la maladie et à son impact sur le corps », regrette-t-elle. Résultat, une errance médicale de dix ans, en moyenne, qui peut entraîner des dégâts irrémédiables. Au-delà de la souffrance physique, cette pathologie chronique provoque un tremblement de terre émotionnel. « Je me sens coupable d'être aussi épuisée, et c'est embarrassant de saigner autant », confie la maquilleuse. Sans parler de l'épée d'infertilité au-dessus de la tête...
Des actions de sensibilisation
Les femmes concernées multiplient les actions de sensibilisation pour rendre visible cette maladie encore méconnue. En novembre 2017, déjà, l'Anglaise Georgie Wileman photographiait son ventre scarifié par les multiples opérations subies pour freiner les effets de la maladie. « Je voulais montrer l'espoir désespéré que vous essayez de refréner à chaque nouvelle opération, chaque nouveau traitement, et la douleur quand vous réalisez que ça ne marche pas. Les flashs de peur en pensant que votre condition n'évoluera pas, qu'elle ne s'améliorera pas. La douleur physique peut vous faire croire que vous devenez folle », écrivait-elle alors sur son site web. De son côté, Andrea Baines, aspire désormais, à travers ses créations, à « susciter l'intérêt du grand public et à se connecter avec toutes ces femmes qui souffrent également ». Une image vaut mille mots, elles en font la démonstration avec ces clichés saisissants. Leur leitmotiv : « Nous sommes 1 femme sur 10 et voulons être vues ! ».