Forme(s) de vie : dépasser le handicap par la danse

Des corps détraqués par la maladie rencontrent les corps vigoureux de danseurs pro. Dans "Forme(s) de vie", ils virevoltent sur scène, montrant qu'ensemble les êtres humains peuvent dépasser le handicap. Une expo est également dédiée à Paris fin 2021

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Illustration article Forme(s) de vie : dépasser le handicap par la danse

DERNIERE MINUTE DU 10 DECEMBRE 2021
Après un spectacle cet été, "Forme(s)de vie", revient à Paris sous la forme d'une exposition dédiée à Éric Minh Cuong Castaing, jeune chorégraphe favorisant la rencontre entre corps empêchés suite à une maladie ou à un accident et d'autres dits virtuoses. Elle est à découvrir du 10 décembre au 6 février, de 12 à 19h, au sein du BAL (6 impasse de la Défense 75018 Paris), un espace d'exposition, de réflexion et de pédagogie dédié à l'image-document sous toutes ses formes. A la croisée de la chorégraphie et du processus de soin, elle est présentée sous la forme d'une installation vidéo et sonore. Billetterie sur le lien suivant :
https://www.helloasso.com/associations/le-bal/evenements/exposition-forme-s-de-vie-eric-minh-cuong-castaing

ARTICLE INITIAL DU 29 JUIN 2021
Par Isabelle Wesselingh

Présenté en première à l'ouverture du festival de Marseille (du 17 juin au 29 août 2021), avant de tourner à Paris, en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas, "Forme(s) de vie", d'Eric Minh Cuong Castaing, s'est nourri des rencontres, depuis janvier 2019, entre les danseurs de sa compagnie Shonen (lien ci-dessous) et les résidents du centre de soins palliatifs La Maison, à Gardanne, près de Marseille. C'est là qu'Eric Minh Cuong Castaing a croisé Kamal Messeleka, un ancien boxeur au corps malmené par une maladie chronique. Il est l'un des deux interprètes en perte de mobilité sur scène, avec l'ancienne danseuse et traductrice Elise Argaud, 44 ans, atteinte de la maladie de Parkinson depuis 2015. A leurs côtés, trois danseurs professionnels aux corps affûtés, dont l'un, Nans Pierson, formé à l'école de danse de l'Opéra de Paris.

Oublier le handicap, la douleur

"Youhou, yes !" Voici Kamel qui clame sa joie, sourire aux lèvres après avoir traversé la scène dans une danse inspirée de la boxe puis s'être élancé dans les airs vers les gradins et les spectateurs. Lui qui ne peut plus marcher seul a reconquis une infime partie de sa mobilité au prix de séances quotidiennes de kinésithérapie. Il danse, flotte dans l'air car il ne forme plus qu'un seul corps avec deux autres danseurs, Aloun Marchal et Nans Pierson. Ils le portent, le touchent, bougent avec lui, comme deux "prothèses humaines" qui soudain rendent possible l'impossible. Et les spectateurs applaudissent, même si c'est en pleine représentation, juste touchés par ces instants de grâce où la douleur, la rigidité, le handicap semblent chassés, oubliés. "Avec eux, je me regonfle, j'ai comme un deuxième souffle, j'ai entièrement confiance en eux", lâche Kamal après le spectacle.

La maladie, un «ghetto»

"J'ai beaucoup pratiqué la danse avant ma maladie et dans ce spectacle je retrouve le plaisir du corps en mouvement", confie à l'AFP Elise Argaud. Sur scène, elle danse avec la Japonaise Yumiko Funaya qui l'aide à prolonger un plié, la tension d'un bras, la torsion d'un buste. Chaque mouvement se fait dans la lenteur, la douceur, dans une extrême concentration. Puis Aloun Marchal poursuit le duo avec Elise, l'emmenant dans des sauts empreints de légèreté. "Le rapport au toucher est super important pour rester vivant", souligne Elise Argaud. "Sentir le corps qui se détraque, c'est une souffrance, un traumatisme (...) La maladie devient très vite un ghetto, on est invisibilisé, on n'a plus de place dans la société", poursuit-elle.

Mêler l'art et le soin

Dans "Forme(s)de vie", qui comprend aussi des films captant différents moments avec les résidents du centre de soins palliatifs, Eric Minh Cuong Castaing a, au contraire, fait le choix d'associer pleinement Elise et Kamal au processus créatif, de se nourrir de leur mémoire du mouvement, de leur perception, de leur combat. "On n'est pas là pour dire 'regardez, ces gens-là peuvent marcher et danser', on est dans la créativité qui naît du rapport entre deux corps différents". "Travailler avec Kamal, bouger avec Kamal m'apporte beaucoup dans ma carrière de danseur", abonde Nans Pierson.

Parmi les spectateurs, un médecin, Jean-Marc Lapiana, était particulièrement ému. Directeur du centre de soins palliatifs de Gardanne, il avait donné carte blanche à la compagnie Shonen. "Le soin et l'art peuvent être mêlés. Vous avez su le mettre en image et en scène dans cette création artistique. Quand on a une attention les uns envers les autres, on peut vivre des choses inédites, malgré l'incapacité des corps, avoir de la sensualité dans les gestes", a-t-il lancé aux artistes à l'issue de la représentation. Le danseur et co-chorégraphe Aloun Marchal a rebondi : "Cela montre qu'ensemble, on peut dépasser les situations de handicap, on peut créer une société où il y a de place pour tout le monde".

Où le voir bientôt en France ? Scène nationale Points Communs-Cergy (95), Carreau du Temple à Paris..

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