« La parole est un droit, pas un privilège », martèle Céline Poulet, secrétaire générale du Comité interministériel du handicap (CIH). Cette conviction guide aujourd'hui une avancée majeure pour les personnes en situation de handicap. L'instruction de la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) aux Agences régionales de santé (ARS), parue au Bulletin officiel santé, protection sociale et solidarités du 30 juin 2025, acte la mise en place de missions départementales d'expertise et d'information sur la Communication alternative et améliorée. L'enjeu ? Garantir à chacun les moyens de s'exprimer, même sans parole, grâce à des outils adaptés, comme les pictogrammes, les tablettes vocales ou les gestes (CAA: ces outils qui permettent aux non-verbaux de s'exprimer).
La CAA : un droit fondamental méconnu
La CAA, reconnue par la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, est bien plus qu'un outil technique, « c'est un moyen d'expression essentiel », affirme Céline Poulet. « Permettre à chacun d'avoir des moyens de communication et des environnements qui s'y adaptent (culture, justice, santé, sport...) est un droit fondamental », insiste cette fervente militante de la CAA. Pourtant, il reste aujourd'hui ignoré dans nombre d'établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS), scolaires ou culturels.
Des missions CAA dans tous les départements d'ici 2027
La nouvelle instruction vient donc rappeler avec force l'obligation faite aux ESMS d'équiper chaque personne non-oralisante de moyens de communication personnalisés permettant d'exprimer sa pensée, ses besoins et ses émotions. En outre, la création, dans chaque département d'ici 2027, d'une mission d'information et d'expertise ouverte à tous sur la CAA, est dotée de neuf millions d'euros dès 2025 pour couvrir un tiers du territoire. Cette mesure ambitionne de structurer durablement l'écosystème de la CAA, en lien avec les acteurs locaux, les professionnels et les familles.
« Nous avons un retard très important qu'il va falloir rattraper », reconnaît Céline Poulet. Cette nouvelle instruction, annoncée lors de la Conférence nationale du handicap de 2023 et reprise lors des comités interministériels de 2024 et 2025, entend bien donner l'impulsion nécessaire.
Une dynamique collective à consolider
Cette avancée est le fruit d'une mission collaborative « inédite ». « C'est l'aboutissement d'un long travail avec les personnes concernées : parents, associations, experts, administrations, soutenus par la ministre déléguée au Handicap Charlotte Parmentier-Lecocq », indique Céline Poulet. Mais pas question de s'arrêter là ! « C'est surtout la première étape d'un long travail qu'il reste à mener et sera suivi de près par le Secrétariat général du CIH... » Un suivi essentiel pour éviter que les engagements ne restent lettre morte. Former, outiller, accompagner, tel est désormais le triptyque à mettre en œuvre à tous les niveaux pour que la CAA devienne réalité.
La CAA, l'affaire de tous
Derrière cet acronyme, il y a des vies. Des enfants qui veulent raconter leur journée, des adultes qui veulent faire des choix, des victimes qui veulent témoigner (Viol dans un IME: à 14 ans, il brise l'omerta grâce à la CAA). « La CAA, c'est tout cela, résume Mme Poulet. « C'est un levier majeur d'accès aux droits, d'autodétermination, de désinstitutionalisation, et de lutte contre les violences, en particulier sexuelles, conclut-elle. C'est l'affaire de tous ! »
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