Au premier jour de compétition des Jeux paralympiques de Rio, Thabiso Ratsoane hurle à en perdre le souffle à l'entrée en piste d'un de ses athlètes et l'émotion de cet entraîneur du Lesotho contamine le public. Sauf que, comme le laissait craindre des ventes de billets longtemps anémiques pour ces premiers Jeux paralympiques en Amérique latine, les deux tiers des 60 000 sièges du stade olympique Engenhao sont désespérément vides. Même constat aux arènes de judo et de tennis de table où les gradins sont aux trois-quarts désertés.
La natation fait un carton
Il faut se rendre au stade aquatique pour rencontrer, enfin, un public nourri et bruyant de Brésiliens venus assister à l'entrée en lice du leur star nationale Daniel Dias, six fois médaillé d'or à Londres en 2012. "Il y a beaucoup moins de monde qu'au premier jour des Jeux olympiques" du mois d'août, constate Liliam Lima, une volontaire de 65 ans à l'entrée du Parc olympique. "Il y en avait plus de deux fois plus, peut-être trois ou quatre fois plus", ajoute-t-elle. Mais contrairement à ce jeudi de travail ordinaire pour les Cariocas, la journée du coup d'envoi des compétitions des JO, le 5 août, avait été déclarée fériée par le maire de Rio. "Tout le monde était libre. Pour nous, le record d'affluence devra sûrement attendre ce week-end", se console Liliam. Mais le vide des tribunes est souvent comblé par l'enthousiasme et l'admiration du public.
La leçon ? Pas de limites
"Quand tu vois ce que sont capables de faire ces personnes, ça te laisse bouche-bée", commente Lucas Casaroli, une étudiante en océanographie de 23 ans. Pour elle, "la leçon de ces Jeux paralympique est simple: il n'y a pas de limites, les limites c'est toi qui te les imposes par ton manque de volonté". Au Rio centro Arena, où huit rencontres de tennis de table se disputent simultanément, une petite centaine de Brésiliens scandant "Brésil ! Brésil !" et chantant à tue-tête des refrains de samba ferait aisément croire à un aveugle que les tribunes sont archi-combles. Les organisateurs se veulent optimistes, malgré une préparation fortement affectée par le marasme financier du comité Rio-2016.
Une chance rare de changer les attitudes
La joyeuse cérémonie d'ouverture s'est tenue à guichets fermés le 7 au soir au stade Maracana. Et les ventes de billets, encore très préoccupantes il y a une semaine, semblent enfin commencer à décoller. Au total, 1,7 millions de billets ont été vendus. "A ce stade, nous sommes très heureux de voir que le Parc olympique est rempli d'enfants des écoles qui vont vivre une expérience magique", a déclaré le porte-parole de Rio-2016, Mario Andrada. Rio de Janeiro, à l'image du Brésil en général, ne facilite pas la vie des personnes handicapées et ces Paralympiques sont vus ici comme une chance rare de changer regard et attitudes. "Le principal objectif de ces Jeux est certainement de convaincre la société brésilienne que nous devons offrir plus d'inclusion et d'accessibilité, comprendre nos différences et toujours nous rappeler que nous avons tous un coeur semblable", souligne M. Andrada.
Ville de Rio : parcours du combattant
Jadir Antunes, qui a perdu ses deux jambes dans un accident de voiture à l'âge de six ans, se félicite de la qualité de l'accès en transport public au Parc olympique où il est venu assister à des rencontres de basket en fauteuil roulant. "C'était vraiment super, bien organisé, déclare Antunes, 49 ans. Mais à Rio, les choses doivent changer. Les trottoirs sont éventrés, la plupart de rampes d'accès au bus pour fauteuils roulants sont cassées. Les ascenseurs du métro tombent souvent en panne." Paul Eduardo Paggiossi, un fonctionnaire de 54 ans venu de Sao Paulo, se félicite également de la mise à disposition de fauteuils roulants aux visiteurs handicapés du Parc olympique, comme sa fille de 13 ans, Maria-Eduarda, qui n'a jamais pu vraiment bien marcher depuis sa naissance. "C'est gratuit, et cela fonctionne très bien, dit-il. Mais ce n'est que le premier jour. Espérons que cela fonctionnera jusqu'au bout. Parce que pour une personne à faible mobilité, 100 mètres à parcourir en marchant c'est comme 10 kilomètres."
Par Javier Tovar, Sebastian Smith
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