55 000 passionnés, environ, s'élanceront des Champs-Élysées ce dimanche 13 avril 2025 pour la 48e édition du marathon de Paris. Au terme de cette course mythique, la plupart rentreront chez eux fiers mais exténués, avec 42,195 kilomètres dans « les » pattes... ou dans « une » patte, pour Nicolas Lacambre, amputé de la jambe et du bras gauches. À 41 ans, le coureur originaire de Bordeaux réalise son troisième marathon en un mois, avec l'objectif d'en faire 10 en un an. Un défi haletant qui permet à ce sportif de se sentir en vie, après avoir failli la perdre 17 ans plus tôt...
« Pascal Obispo m'a sauvé la vie »
26 février 2008. Lors d'une virée à moto, Nicolas se fait percuter de plein fouet par une voiture. Le chauffard prend la fuite. « Par chance, le conducteur qui se trouve derrière moi fait preuve d'un courage héroïque et me sauve la vie en me portant secours et en prévenant les pompiers », raconte-t-il. Ce « héros » n'est autre que le chanteur Pascal Obispo, avec qui il noue une amitié. Dix ans après l'accident, ils décident de raconter leur histoire, chacun à leur manière : Nicolas sort un livre, Pascal un clip, On n'est pas seul sur la Terre. Deux canaux mais un seul titre, un seul objectif : transmettre un message de résilience et de bienveillance. Entretien avec celui qui se surnomme « l'homme de fer »...
Handicap.fr : Pensiez-vous pouvoir recourir après votre accident ?
Nicolas Lacambre : Étant très sportif avant mon accident, j'en rêvais... Et cela a été possible grâce au groupe Laguarrigue qui m'a offert une lame de course Hopper que j'enfile avant chaque marathon depuis trois ans.
H.fr : Pourquoi le marathon ?
NL : J'ai choisi cette instance reine car elle représente un défi de taille pour de nombreuses personnes passionnées de course à pieds. Elle demande énormément de préparation et de capacités mentales, en amont, et, le jour J, fait ressentir une gigantesque palette d'émotions tout au long du parcours. Chaque victoire est un vrai témoignage du dépassement de soi.
H.fr : Quel a été l'élément déclencheur ?
NL : J'ai décidé de courir mon premier marathon à la naissance de ma deuxième fille car je voulais réaliser un défi à la hauteur de ce que sa maman avait vécu, entre la grossesse et l'accouchement, afin de lui montrer tout mon admiration. Puis je suis devenu addict à cette discipline.
H.fr : Que vous a-t-il apporté in fine ?
NL : Cela m'apporte beaucoup de bonheur et me permets d'avoir davantage confiance en moi. Grâce à ces expériences, je rencontre de nombreuses personnes et reçois beaucoup de soutien. Dans la vie quotidienne, c'est souvent difficile de faire de nouvelles connaissances à cause de la barrière du handicap mais lorsque j'enfile cette lame de course, c'est un tout autre regard qui se pose sur moi.
H.fr : Et, aujourd'hui, quel est votre objectif ?
NL : À travers mes participations, je souhaite sensibiliser les pouvoirs publics à l'importance de la prise en charge du matériel de sport pour les personnes en situation de handicap. J'espère aussi pouvoir diffuser un souffle d'espoir aux personnes amputées à la suite d'un accident et, plus largement, à celles en situation de handicap. En trois ans, j'ai déjà bouclé sept marathons et, chaque fois, je reçois de nombreux témoignages d'admiration et de respect des organisateurs ainsi que des coureurs qui ne s'attendent pas à me voir courir une telle distance. Cela éveille les consciences et montre que, malgré le handicap, tout est encore possible.
H.fr : Comment s'est déroulée la préparation du Schneider Electric marathon de Paris ?
NL : Je n'ai pas de coach ni de club d'athlétisme pour le moment, alors je réalise l'essentiel de ma préparation seul, en faisant beaucoup de volume. Je réalise quatre à cinq sorties longues par semaine pour atteindre les 300 à 400 kms par mois.
H.fr : Avez-vous traversé des périodes de doute lors des entraînements ? Qu'est-ce qui vous a aidé à les dépasser ?
NL : Quand la fatigue, une plaie ou la douleur apparaissent, je me remémore le chemin qu'il m'a fallu parcourir pour en arriver-là et je repars de plus belle en me disant qu'il y a toujours pire que moi.
H.fr : Quelles valeurs souhaitez-vous mettre en lumière lors de cette course ?
NL : L'inclusion et la mixité !
H.fr : La société évolue-t-elle dans le sens de l'inclusion, selon vous ?
NL : Oui, de plus en plus, que ce soit dans les médias, l'emploi ou le sport, et c'est une bonne nouvelle car je pense que cela est essentiel si nous voulons offrir une société plus unie aux générations futures.
© Nicolas Lacambre