21 janvier 2023. La nouvelle passerelle de Nogent-sur-Marne, dans le Val-de-Marne, est inaugurée en grandes pompes. Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France, Sophie Thibault, préfète, Olivier Capitanio, président du département, élus, sénateurs, députés, se sont donné rendez-vous pour couper le ruban tricolore, sous les applaudissements de quelques badauds.
3 ans de travaux
Après trois années de travaux, entre 2020 et 2023, cet ouvrage colossal de 250 mètres qui enjambe la Marne s'ouvre enfin aux riverains. Tous ? Pas tout à fait. Cet équipement dédié aux mobilités douces, cofinancé par la région et l'Etat, est parfait pour les piétons et les cyclistes. Il leur permet « d'éviter une traversée dangereuse et une circulation plus sécurisée pour les enfants, les seniors, les cyclistes et les personnes à mobilité réduite », informe la préfecture sur son site. Or la réalité est bien différente pour certains riverains en situation de handicap qui sont contraints de contourner l'ouvrage, auquel on accède par un escalier, en empruntant une rue parallèle, dont la largeur du trottoir se réduit au bout de quelques mètres, rendant impossible le passage d'un fauteuil roulant électrique.
Principe d'accessibilité non respecté
Pour comprendre ces difficultés d'accès, Handicap.fr a suivi Laetitia Ménager, ex-représentante APF France handicap dans le Val-de-Marne (vidéo ci-contre à découvrir sur handicap.live, la toute nouvelle plateforme lancée par Handicap.fr). Au lieu des quelques secondes requises via l'escalier, une bonne quinzaine de minutes de contournement sont nécessaires par la rue de Nazaré. Sans compter l'effort demandé durant les quelques mètres de dénivelé. Une fois en haut, nouvelle difficulté : les usagers en fauteuil doivent s'engager sur un trottoir qui longe l'A86 et sa circulation dense. Une vraie galère !
Hasard du calendrier, le Comité européen des droits sociaux (CEDS), une structure du Conseil de l'Europe basée à Strasbourg, a annoncé le 17 avril 2023 avoir conclu à l'unanimité que la France avait violé plusieurs articles de la Charte sociale européenne. Dix-huit ans après la loi de 2005, « le principe d'accessibilité n'est toujours pas respecté en France », a-t-il jugé (Lire : Handicap : la France épinglée par le Conseil de l'Europe). Pire, les obligations de l'Etat et de ses services en matière d'accessibilité ont, selon lui, « régressé dans tous les domaines, et les nouvelles réglementations décalent indéfiniment la mise en accessibilité réelle »…
De nouveaux aménagements prévus
Le cas de la passerelle de Nogent-sur-Marne en est la parfaite illustration. « Comment la construction d'un ouvrage aussi récent peut-elle 'oublier' de telles notions de base d'accessibilité ? » s'interroge Laetitia Ménager. Ces manquements aux droits fondamentaux des personnes handicapées, le maire de Nogent-sur-Marne, Jacques Jean-Paul Martin, en a bien conscience. En pourparlers avec la direction des routes d'Ile-de-France (DiRIF) et le département, propriétaire de l'ouvrage, le maire avait décidé de boycotter l'inauguration du pont en décembre 2022, avant de se raviser. L'élu réclame en effet depuis plusieurs mois l'installation d'un ascenseur. Un aménagement qui n'est d'ailleurs pas mission impossible. Un hôtel aux abords de la passerelle en a installé un pour sa clientèle il y a plusieurs années.
Reste à convaincre toutes les parties prenantes, ce qui, selon la municipalité, est en « bonne voie ». Pourtant, la région Ile-de-France a affirmé lors de la dernière commission permanente qu'était menée une réflexion concernant la mise en place d'une piste cyclable pour rejoindre la gare de Nogent-Le-Perreux dans le cadre de l'aménagement des jardins des rives de la Marne... au lieu d'un ascenseur !, rappelle Claude Boulanger-Reijnen vice-président de la commission transports et mobilités du CESER Ile-de-France !
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