Après avoir investi la rue le 6 octobre 2021 (articles en lien ci-dessous), les acteurs du secteur de l'aide aux personnes âgées et handicapées, aux sans-abris ou aux enfants en danger assurent qu'un jour ne suffira pas et annoncent une « mobilisation nationale » dans la durée.
Non-assistance à personne en danger ?
« Malgré des alertes répétées sur les tensions dans les structures et services des champs du médico-social, du social et de la santé, les réponses des pouvoirs publics ne sont pas à la hauteur de la crise croissante que connaît le secteur », explique l'Uniopss, qui représente 25 000 établissements des secteurs sanitaire, social et médico-social. « Nous lançons un cri d'alarme », a résumé lors d'une conférence de presse Patrick Doutreligne, son président. « Si on ne résout pas le problème de l'attractivité des métiers, l'étape suivante ce sera la non-assistance à personne en danger. Faute de personnel, nous allons renvoyer des personnes vulnérables hors des établissements », a-t-il mis en garde.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : « Depuis 15 ans, ces professionnels engagés au quotidien auprès de personnes en situation de vulnérabilité n'ont connu aucune revalorisation salariale », souligne Eric Yapoudjian, directeur général de la Fondation de l'Armée du Salut. Alors qu'il faudra plus de 90 000 infirmiers et plus de 200 000 aides-soignants dans les prochaines années, comment faire face, quand ces mêmes professionnels démarrent respectivement avec un salaire de 1 600 euros et de 1 400 euros ? Rappelons qu'en 2050, plus de 5 millions de Français auront plus de 85 ans : « Nous n'avons plus le temps d'attendre ».
Un vrai casse-tête
Dans certaines structures, notamment pour personnes polyhandicapées, « on n'a plus assez de personnel pour assurer trois repas par jour aux résidents. C'est dramatique », s'est inquiété Luc Gateau, président de l'Unapei, qui gère des établissements pour enfants et adultes porteur d'un handicap mental. En Haute-Savoie, 150 personnes handicapées hébergées dans des foyers de l'Unapei ont dû retourner chez leurs proches car 125 postes sont vacants et, en Loire-Atlantique, l'association « a dû lancer un appel à bénévolat pour encadrer certaines activités ». La situation est également très préoccupante dans les secteurs de la protection de l'enfance, de l'aide aux personnes précaires ou encore de l'aide à domicile pour les personnes âgées ou handicapées. « C'est un casse-tête quotidien. Non seulement nous avons des CDI non pourvus mais nous n'arrivons même plus à pourvoir ces postes avec des intérimaires ou des vacataires », a souligné Sophie Péron, du GNDA, qui regroupe des directeurs d'associations à but non lucratif dans le secteur de l'action sociale. « Les gestionnaires ne sont plus en mesure d'assurer la sécurité des personnes accompagnées », a-t-elle ajouté.
Dans le même temps, alors que les besoins sociaux s'intensifient, les entrées en formation dans l'ensemble des métiers du social ont diminué de 10 % et certains jeunes abandonnent leur cursus en cours de route. Ainsi, selon des données publiées par la DREES, le secteur a connu, entre 2010 et 2018, une baisse de 50 % des personnes formées, indique Patricia Sitruk, directrice générale de l'OSE (Œuvre de secours aux enfants).
Des disparités de salaires
Une partie des difficultés s'explique par des disparités de traitement entre salariés ; les hausses de rémunération octroyées à l'été 2020 lors du Ségur de la santé aux personnels des hôpitaux et des maisons de retraite ont été ensuite étendues progressivement à d'autres secteurs, mais selon un processus très complexe, qui n'a pas encore abouti pour tous les métiers (article en lien ci-dessous). Cela a entraîné un « secteur médico-social à deux vitesses » et une « fuite des compétences pour les secteurs mieux rémunérés », qui a accru les difficultés de recrutement, a expliqué Pascale Ribes, la présidente d'APF France Handicap. Or, dans le budget 2022 de la Sécurité sociale, qui doit être présenté le 7 octobre 2021 en conseil des ministres, le gouvernement n'a prévu aucune enveloppe financière pour combler ces disparités, a déploré la semaine dernière Nexem, l'organisation regroupant les employeurs du secteur. Pour y remédier, une revalorisation des salaires est indispensable mais également une amélioration des conditions de travail, l'organisation de parcours de formation ainsi qu'une promotion de ces métiers dès le collège, ont insisté les représentants.
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