Quelle place pour le handicap dans les programmes des 11 candidats engagés dans cette campagne présidentielle 2017 ? Comme lors des deux primaires, nous leur avons soumis le même questionnaire. Nous publions les réponses à mesure qu'elles nous arrivent… ou pas !
1. École : Partant du principe que la scolarité n'est obligatoire qu'à partir de 6 ans, prévoyez-vous « d'encourager », voire d'imposer à l'Éducation nationale qu'elle accepte les enfants en situation de handicap, notamment autistes, dès la maternelle ?
L'école est un droit fondamental et constitutionnel. Nous souhaitons que les enfants en situation de handicap puissent bénéficier du même accès à la scolarité que les autres enfants (à savoir un droit à la scolarisation dès trois ans) et entendons appliquer strictement les accords internationaux de l'ONU sur le handicap ratifiés par la France et non appliqués à ce jour. L'école maternelle est un lieu important de socialisation, nous entendons donner les moyens d'accueil nécessaires (AESH, formation des enseignants…) pour permettre et garantir l'inclusion réelle de ces enfants dans le système scolaire et mettre fin au fait que plus de 20 000 d'entre eux à ce jour sont toujours sans solution, l'école étant pourtant obligatoire.
2. École : Combien comptez-vous créer de postes d'AESH (ex AVS) pour l'accompagnement des élèves handicapés ? À quelle échéance ? Sur quelle durée ?
Nous souhaitons créer autant de postes que de besoin afin de pouvoir accompagner dignement les enfants déjà scolarisés et également ceux se trouvant encore aujourd'hui sans solution. Cela va passer par le recensement des besoins et sera mis en œuvre rapidement dès le début du quinquennat. Ces AESH seront formés, diplômés et surtout titularisés avec un salaire correspondant à leurs missions ! Plus de postes précaires !
3. Accessibilité : Pensez-vous revenir sur le dispositif des Ad'AP (Agenda d'accessibilité programmée) ? Quelle serait votre mesure phare pour accélérer la mise en œuvre de l'accessibilité dans nos villes/entreprises/ERP/administrations/écoles… Quel budget comptez-vous y consacrer ?
Nous souhaitons atteindre l'objectif « Zéro obstacle » et mènerons donc une politique tolérance zéro face aux entraves. Pour ce faire, un montant de 10 milliards sera dédié à cette mise en accessibilité. Les préfets pourront se substituer aux maires pour l'accélérer. Nous systématiserons la mise en place de commissions municipales d'accessibilité (logements, voiries, bâtiments municipaux, sports, loisirs, culture…). Et nous travaillerons également dans les lieux de culture à la présence d'audio-guides, de guides LSF, de dispositifs d'audiodescription.
4. Emploi : Comment comptez-vous réduire durablement le taux de chômage des personnes en situation de handicap, aujourd'hui deux fois supérieur à la moyenne nationale ?
Nous souhaitons pourvoir l'ensemble des départements d'un centre de pré-orientation en relation avec la Maison départementale des personnes handicapées qui contribuera à l'orientation professionnelle des travailleurs confrontés à des situations de handicap. Il faudra également assurer la cohérence des actions du service public de l'emploi et des organismes de placement spécialisés pour dynamiser l'emploi des travailleurs en situation de handicap, via un dispositif de pilotage incluant l'État et les Fonctions publiques, le service de l'emploi et le secteur médico-social, l'Agefiph et les partenaires sociaux. Il faut également arrêter de ponctionner et voler les caisses destinées à l'emploi des personnes en situation de handicap et utiliser ces crédits pour accélérer l'accessibilité à l'emploi et non la mise en sécurité des universités ! Voici quelques mesures parmi celles que nous détaillons dans notre livret thématique.
5. Emploi : Quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour sauver les deux Fonds dédiés à l'emploi des personnes handicapées (Fiphfp et Agefiph) qui, par l'effet ciseau dépenses/recettes, sont condamnés d'ici moins de deux ans ?
Il s'agit déjà de récupérer l'argent détourné et d'exercer un contrôle strict sur l'utilisation des fonds. De plus, on peut imaginer réévaluer à la hausse l'amende pour les entreprises ne respectant pas l'obligation d'emploi du quota des personnes en situation de handicap, quota qui pourra être modulé en fonction de la taille des entreprises. Nous pourrions également y affecter le montant des amendes de stationnement sur les places réservées.
6. Revenu : Comptez-vous augmenter l'AAH (Allocation adulte handicapé) et, si oui, de combien et à quelle échéance ?
Il s'agira d'une mesure immédiate : porter l'AAH au montant du SMIC pour les personnes dans l'incapacité totale de travailler afin de sortir les personnes de la précarité dans laquelle elles sont enfermées, avec possibilité de déclarer indépendamment les revenus du conjoint.
7. Harmonisation : Comment comptez-vous réduire la disparité des aides versées par les régions/CAF/MDPH aux personnes en situation de handicap ?
Il s'agit d'une inégalité criante qui ne peut plus durer. Il faut donc permettre l'égalité de traitement sur tout le territoire. C'est une politique nationale et non territoriale à moyens variables en fonction de la « richesse » de la collectivité territoriale. Pour une même problématique, la réponse est complètement différente d'un département à l'autre et cela n'est pas admissible ! Il faut donc harmoniser tout cela, c'est le rôle de l'État.
8. Compensation : Êtes-vous favorable aux remboursements à 100% par la sécurité sociale de tous les soins et outils de compensation liés aux handicaps ?
Oui, notamment la prise en charge des frais de psychomotricien, d'ergothérapeute, de psychologue et de tous les équipements nécessaires à la vie quotidienne. Nous souhaitons également mettre en place des plans cohérents et financés, notamment pour le polyhandicap, l'autisme mais aussi des maladies handicapantes telles que la fibromyalgie et autres maladies invalidantes, de façon à adapter le mieux possible les prises en charge, lieux d'accueil et modalités de soin.
9. Aidant : Êtes-vous favorable à un statut juridique unique des aidants familiaux leur donnant accès à la formation et à une compensation financière ?
Nous souhaitons redéfinir l'obligation familiale et revaloriser l'aide apportée dans ce cadre par l'aidant familial, via la création d'un véritable statut, incluant la reconnaissance du droit de répit, afin d'assurer à la personne un minimum d'indépendance et de dignité. Nous voulons également créer un véritable métier de l'accompagnement avec un salaire de base fixé au-delà des minimales actuelles. Nous souhaitons également permettre aux parents de bénéficier d'aménagements horaires dans le cadre du travail et faciliter ainsi les modes de garde et la prise en charge de leur enfant en situation de handicap et favoriser leur insertion professionnelle.
10. Accueil : Près de 8 000 adultes et enfants sont exilés en Belgique, faute de places dans les établissements médico-sociaux de notre pays. Quelles mesures pour limiter cet exode ?
Nous souhaitons mettre fin à cet exil forcé aux conditions dramatiques pour la personne et sa famille. Cet exil a un coût énorme en plus de la détresse de ces personnes. Il convient d'investir pour un accueil digne et humain. Il convient de créer de petites structures adaptées, à taille humaine, proches des lieux de vie des parents, avec la présence obligatoire d'éducateurs dont le métier sera revalorisé et développé. Nous appliquerons dans tous les établissements les règles strictes de bientraitance en conformité avec les recommandations de la Haute autorité de santé, ainsi que les accords internationaux de l'ONU sur le handicap.
Question bonus…
Seriez-vous prêt à nommer 6% de vos ministres en situation de handicap (même quota que pour les entreprises) dans votre gouvernement ? Même question en matière de personnel ? Et à appliquer concrètement l'avis du conseil de l'Europe sur l'instauration des quotas aux élections législatives et locales pour les personnes en situation de handicap ?
Avant toute chose, nous souhaitons rendre accessibles les élections (campagne, matériel et lieux de vote). Il s'agit de défendre la visibilité effective des personnes en situation de handicap dans tous les domaines y compris la politique. Nous nous engageons à favoriser et encourager la participation à la vie publique et politique en adéquation avec l'article 29 de la convention handicap de l'ONU. Il est bien évident qu'en matière de personnel nous respecterons la loi. Nous souhaitons garantir la citoyenneté pleine et entière des personnes en situation de handicap ! Nous mènerons en ce sens une politique transversale interministérielle parfaitement coordonnée, ce qui n'a jamais été le cas auparavant.
*Propos de Marie-Laure Darrigade, co-responsable du livret handicap de la France insoumise.