Quelle place pour le handicap dans les programmes des 11 candidats engagés dans cette campagne présidentielle 2017 ? Comme lors des deux primaires, nous leur avons soumis le même questionnaire. Nous publions les réponses à mesure qu'elles nous parviennent… ou pas !
1. École : Partant du principe que la scolarité n'est obligatoire qu'à partir de 6 ans, prévoyez-vous « d'encourager », voire d'imposer à l'Education nationale qu'elle accepte les enfants en situation de handicap, notamment autistes, dès la maternelle ?
Aujourd'hui, l'Éducation nationale est tenue d'accueillir tous les enfants dès 3 ans si les parents en font la demande. Il n'y a aucune raison qu'il en soit autrement pour les enfants en situation de handicap. L'école de la République telle que je la conçois ne fait pas de distinction entre les enfants qu'elle accueille. À ceux qui sont en situation de handicap, elle doit permettre une scolarisation dès la maternelle et ce quel que soit le handicap considéré, y compris les troubles du spectre autistique. Et, de manière générale, je propose que la scolarité soit obligatoire à partir de 5 ans. Mais il est vrai que la différence n'est parfois pas simple à accueillir quand on ne se sent ni formé, ni préparé. C'est pourquoi pour améliorer l'accueil des enfants en situation de handicap, en crèche, à l'école, dans l'enseignement secondaire et supérieur, une formation initiale et continue sur les handicaps sera proposée à tous les professionnels concernés.
2. École : Combien comptez-vous créer de postes d'AESH (ex AVS) pour l'accompagnement des élèves handicapés ? À quelle échéance ? Sur quelle durée ?
Le nombre d'AESH doit être fonction des besoins en accompagnement des élèves en situation de handicap. Je souhaite aussi que ces professionnels soient mieux formés et je lancerai prioritairement un plan global de qualification des accompagnants. C'est un enjeu majeur que les élèves puissent être accompagnés de la crèche à l'enseignement supérieur à la hauteur de leurs ambitions scolaires et de leurs capacités.
3. Accessibilité : Pensez-vous revenir sur le dispositif des Ad'AP (Agenda d'accessibilité programmée) ? Quelle serait votre mesure phare pour accélérer la mise en œuvre de l'accessibilité dans nos villes/entreprises/ERP/administrations/écoles… Quel budget comptez-vous y consacrer ?
Notre pays n'a malheureusement pas été au rendez-vous de l'accessibilité fixé à 2015 par la loi du 11 Février 2005. Je veux garantir la mise en œuvre effective de l'accessibilité fixée par la loi. Tout espace public doit être accessible aux personnes en situation de handicap. L'accès aux transports en commun sera facilité. L'allégement des normes d'habitabilité et d'accessibilité sur les logements neufs visera à favoriser la modularité des espaces privatifs et à faciliter ainsi l'intégration ou l'inclusion des personnes en situation de handicap. La mise en œuvre des Ad'AP sera animée, évaluée, suivie et diffusée dans la transparence par le préfet dans chaque département. À ce titre, je pense que la suppression, même partielle, de la taxe d'habitation, que propose Emmanuel Macron, serait délétère pour le budget des mairies qui ont un portefeuille large d'ERP à mettre en accessibilité (écoles, gymnases, mairies, services municipaux, piscines, équipements sportifs…).
4. Emploi : Comment comptez-vous réduire durablement le taux de chômage des personnes en situation de handicap, aujourd'hui deux fois supérieur à la moyenne nationale ? Avez-vous un ou deux exemples concrets ?
Je souhaite que les pouvoirs publics soient très vigilants quant à la formation et l'insertion des personnes en situation de handicap dans l'emploi. J'encouragerai les plus jeunes à poursuivre des études supérieures en développant les conventions multipartites sous l'égide de l'Etat et développerai la formation en alternance des personnes en situation de handicap. Je permettrai à tous les demandeurs d'emplois handicapés d'accéder à une formation adaptée et en adéquation avec les besoins des territoires. Je favoriserai le développement des entreprises adaptées, simplifierai les démarches d'embauche et accroîtrai le nombre de postes. J'inciterai par exemple les entreprises adaptées à devenir de véritables tremplins pour les jeunes en situation de handicap vers l'emploi adapté ou non.
5. Emploi : Quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour sauver les deux Fonds dédiés à l'emploi des personnes handicapées (Fiphfp et Agefiph) qui, par l'effet ciseau dépenses/recettes, sont condamnés d'ici moins de deux ans ?
Avant la fin de l'année 2017, il sera nécessaire d'engager une large discussion avec les gestionnaires du Fiphfp et de l'Agefiph et les partenaires sociaux pour envisager d'aller éventuellement au-delà d'une simple convergence de leur fonctionnement. La Cour des comptes et l'Igas ont déjà suggéré des pistes de travail qui ont été insuffisamment explorées jusqu'à présent.
6. Revenu : Comptez-vous augmenter l'AAH (Allocation adulte handicapé) et, si oui, de combien et à quelle échéance ?
Je rappelle que mon gouvernement avait augmenté l'AAH de 25%. Je considère que la priorité est aujourd'hui l'inclusion des personnes en situation de handicap dans la société, ce qui passe d'abord par la scolarisation des enfants et par l'accès à l'emploi.
7. Compensation : Comment comptez-vous réduire la disparité des aides versées par les régions/CAF/MDPH aux personnes en situation de handicap ?
Il faut bien sûr travailler à l'harmonisation des pratiques entre les territoires : il n'y a pas assez d'échanges entre professionnels des différentes CAF ou MDPH sur leurs façons d'évaluer le handicap et ses conséquences dans la vie quotidienne. La disparité des aides versées par les MDPH aux personnes handicapées est avant tout liée aux différences de ressources que les départements, financeurs de la PCH, sont en mesure d'y consacrer. Cela n'est pas normal, et c'est la raison pour laquelle je veux conclure un pacte avec les collectivités locales pour améliorer l'allocation de leurs ressources et encourager leur bonne gestion. Je veux également simplifier les démarches administratives et créer un outil internet communiquant en temps réel les disponibilités des places au niveau régional pour gommer les effets frontières des départements. Je veux aussi rapprocher les MDPH des personnes en situation de handicap en créant des guichets d'accueil de proximité pour assurer un accompagnement réellement individualisé et accélérer les démarches.
8. Compensation : Êtes-vous favorable aux remboursements à 100% par la sécurité sociale de tous les soins et outils de compensation liés aux handicaps ?
Je suis profondément attaché à notre système de sécurité sociale et de santé solidaire et c'est la raison pour laquelle j'organiserai des États généraux de la santé au plus tard début 2018. Améliorer le remboursement des soins et des appareillages les plus coûteux devra être un axe fort de ces États généraux.
9. Aidant : Êtes-vous favorable à un statut juridique unique des aidants familiaux leur donnant accès à la formation et à une compensation financière ?
La considération portée aux aidants dans notre pays n'est pas satisfaisante alors que de plus en plus de nos compatriotes seront concernés. Je reconnaîtrai aux parents et aux aidants un droit à la formation sur le handicap via le compte personnel de formation ou le congé individuel de formation et je veillerai à la structuration d'une offre de formation de qualité. Je définirai et mettrai en œuvre un véritable accompagnement des familles au moment de l'annonce d'un handicap. La Haute autorité de santé établira un référentiel de bonnes pratiques d'application obligatoire. Enfin, je donnerai un véritable statut légal et fiscal aux aidants familiaux.
10. Accueil : Près de 8 000 adultes et enfants sont exilés en Belgique, faute de places dans les établissements médico-sociaux de notre pays. Quelles mesures pour limiter cet exode ?
Un rapport sénatorial paru en décembre 2016 portant sur la « Prise en charge de personnes handicapées dans des établissements situés en dehors du territoire national » propose des pistes de réflexion insuffisamment explorées jusqu'à présent : développement du pluriagrément des établissements accueillant des personnes handicapées, décloisonnement des secteurs sanitaire et médico-social, engagement d'une stratégie de désinstitutionalisation en fonction de la complexité des profils, meilleure visibilité des places disponibles,, utilisation rationnalisée du potentiel d'accueil des diverses structures. Le 4e plan autisme que je proposerai devra notamment faire toute sa place à la question de l'hébergement des adultes autistes.
Question bonus…
Seriez-vous prêt à nommer 6% de vos ministres en situation de handicap (même quota que pour les entreprises) dans votre gouvernement ? Même question en matière de personnel ? Et à appliquer concrètement l'avis du conseil de l'Europe sur l'instauration des quotas aux élections législatives et locales pour les personnes en situation de handicap ?
J'ai dans mon équipe de campagne des membres très actifs en situation de handicap. Certains s'occupent de ce sujet spécifique, d'autres travaillent sur des thématiques qui n'ont rien à voir. La constitution du gouvernement se fera exclusivement sur des critères de compétences et d'expertise. Je suis contre cette notion de « quota » de personnes handicapées dans un gouvernement ou aux élections législatives. En revanche, j'encourage les personnes en situation de handicap à s'investir davantage en politique. C'est là, je pense, la plus belle expression de la participation à la citoyenneté dans notre République.
© Fillon2017 : Hermès Le Court de Béru