Refus avec violence d'un chien guide: la justice va trancher

En 2018, il est victime d'une violente altercation dans un supermarché à cause de son chien guide. Six ans après, Arthur défend ses droits devant la justice, soutenu par des associations, pour espérer faire, enfin, condamner les récalcitrants.

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« Sortez avec votre chien ! » Le 21 septembre 2018, Arthur Aumoite fait face à un déchaînement de violence de la part du vigile et du directeur du Monoprix de Marseille Blancard (vidéo ci-contre). La faute à la présence de son chien guide, Loya. Ce jeune étudiant de 26 ans malvoyant a beau brandir le texte de loi (celle du 30 juillet 1987), qui légitime ses droits -un chien guide étant considéré non pas comme un animal de compagnie mais un moyen de compensation du handicap-, il fait face à une fin de non-recevoir aberrante, « pour des questions d'hygiène ».

Une expulsion manu militari

La scène est sans équivoque, filmée (Viré manu-militari à cause de son chien guide : la vidéo !). Les deux hommes tentent d'expulser le jeune homme sans ménageement, d'ailleurs soutenus par l'un des clients, puis arrachent le chien pour le pousser vers la sortie, laissant Arthur un collier entre les mains. Dans la cohue, utilisant son faible reste visuel, il tente de rejoindre Loya quand il est projeté dans les rayonnages par le responsable du magasin... Cette scène choque, provoquant un large écho médiatique. Pas question d'en rester-là, cette fois-ci ! 

La justice va trancher !

Six ans plus tard, Arthur Aumoite, aujourd'hui vice-président du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), s'apprête à défendre ses propres droits et ceux de bien d'autres. Le 5 juillet 2024, devant le tribunal correctionnel de Marseille, les sociétés Monoprix et le directeur du magasin devront répondre de ces faits de violences et de discriminations. Soutenu par plusieurs associations qui se portent partie civile (ANM Chiens guides, ApiDV, CFPSAA, Droit pluriel, FFAC, Unadev et Voir ensemble), la victime veut en faire un procès exemplaire pour, enfin, faire appliquer la loi.

Une guerre judiciaire

Tous attendent qu'un tel comportement puisse être reconnu au pénal comme une véritable discrimination. Saisi par le procureur de la République de Marseille, le Défenseur des droits a rendu un avis détaillé au terme duquel elle a estimé que les faits caractérisent en effet le délit de discrimination fondée sur un handicap (Décision du Défenseur des droits n° 2024-092, 12 juin 2024). Droit Pluriel, association qui milite en faveur des droits des personnes handicapées, dit vouloir « entrer en guerre judiciaire contre toutes les discriminations liées au handicap ». « Nous ne pouvons pas participer à tous les procès, cela demande du temps et de l'argent, mais le tournant est pris ! », martèle-t-elle. 

200 cas de refus chaque année

Un peu plus de 2 000 binômes maître/chien guide d'aveugle ou d'assistance sont recensés en France. Chaque année, plus de 200 cas de refus d'accès discriminatoires sont encore déclarés, en majorité dans les commerces alimentaires, les taxis et les VTC (167 refus de chiens guides en 2022, malgré la loi). Or, depuis près de 37 ans, aucune de ces discriminations n'a été reconnue par les tribunaux. 

« Une telle jurisprudence permettrait d'éviter le 'sur handicap' causé par ceux qui ferment encore les yeux devant le besoin d'autrui », plaident Arthur et ses soutiens. Le verdict, qui peut tomber le jour-même comme en septembre, sera d'autant plus scruté, à la veille des Jeux paralympiques, qu'un athlète non-voyant, Timothée Adolphe, s'est encore vu refuser l'accès à un taxi en juin 2024 avec son chien-guide. Une appli existe depuis mars 2024 pour recenser de tels refus et ainsi aboyer d'un même voix encore plus fort (Une appli pour recenser les refus de chien guide).

© Capture d'écran de la vidéo

Capture d’écran de la scène où Arthur se fait violenter.
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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr.Toutes les informations reproduites sur cette page sont protégées par des droits de propriété intellectuelle détenus par Handicap.fr. Par conséquent, aucune de ces informations ne peut être reproduite, sans accord. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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