Dans le garage 56, le coéquipier de Frédéric Sausset, Christophe Tinseau, s'élancera sur l'asphalte des 24h du Mans le 18 juin à 15h. Frédéric, à son tour, prendra le relais pour cette prestigieuse course, malgré son handicap et pour la première fois de sa vie. Quadri-amputé, il peut aujourd'hui se targuer de participer à la plus célèbre course d'endurance auto. Le pilote s'apprête à piloter un bolide pouvant rouler au-delà de 300km/h.
Une simple écorchure sur le doigt
En juillet 2012, Frédéric Sausset a 43 ans. En vacances avec sa famille dans les Landes, il s'écorche le doigt ; sa blessure s'infecte. Fait rarissime, il contracte une bactérie, le streptocoque A, qui ronge progressivement son corps à la suite d'une septicémie. Le pronostic vital est engagé, Frédéric doit être amputé des bras et des jambes pour rester en vie. Lorsqu'il se réveille, après un mois de coma, il ne pèse plus que 40 kg. À l'hôpital, pour tenir bon, il s'imagine à bord d'une voiture de course, atteignant l'inatteignable, relevant un défi inaccessible aux premiers abords. Entrepreneur dans le prêt-à-porter, Frédéric doit tout apprendre de la course automobile. Il retient vite, se fait repérer, aménage son camion, fait des tours de parking, découvre les circuits… Puis parle de son projet à Christophe Tinseau. Ce dernier, pilote professionnel, est impressionné par sa détermination : « J'ai été tellement touché par son histoire que j'essayé de tout mettre en œuvre pour l'aider », confie-t-il.
Un bolide adapté
Quatre ans après ses multiples amputations, Frédéric peut prendre place à bord de son bolide, une voiture de course monoplace adaptée, une Morgan LMP2. Comment pourra-t-il piloter l'engin ? Grâce à des palans, installés sous ses cuisses et reliés aux pédales, utiles pour freiner ou accélérer. Une prothèse, fixée à son bras droit, est aussi reliée au volant grâce à une vis alors que les vitesses se passent via une boîte automatique. Le siège est équipé d'un système de ressort pour qu'il puisse être éjecté en cas d'accident. Si certains ne croyaient pas à ce projet fou, le rêve devient enfin réalité. Il prendra définitivement vie le 18 juin, sur la ligne de départ. Frissons garantis.
Un livre : « Ma course à la vie »
Ce combat, Frédéric le raconte dans un livre publié en octobre 2015, Ma course à la vie, écrit avec Stefan L'Hermitte, grand reporter à l'Équipe magazine. « J'ai réalisé que, pour avancer, il fallait que je me projette dans quelque chose d'énorme sinon je n'aurais pas la force d'accepter mon handicap ». Son parcours fait écho aux tentatives folles de sportifs en situation de handicap. On pense évidemment au nageur Philippe Croizon, lui aussi quadri-amputé, et à son projet de courir le Dakar 2017 ou à Luc Costermans, aveugle, qui fait ses armes en rallye sur le Tour de Corse 2015 (lire articles ci-dessous). Le handicap plein gaz !