Violences femmes handicapées: un nouveau site pour dire stop

Physique, sexuelle, dénigrement, isolement... La violence peut prendre plusieurs formes. Exacerbé en période de confinement, ce fléau touche particulièrement les femmes handicapées. Après une ligne d'écoute, FDFA lance le 1er site dédié à cet enjeu.

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« Bonne à rien », « T'es folle », « Personne ne t'aime », « Je t'interdis de sortir ». Pendant plusieurs années, Sylvie a vécu l'« enfer ». Originaire de Centrafrique, elle quitte son pays en 2010 pour rejoindre son mari, en France. Deux ans plus tard, tout bascule. La violence s'immisce dans son foyer qui devient alors le théâtre d'une véritable « dictature ». Menaces, insultes et coups rythment son quotidien. Très vite, elle s'isole pour éviter la tempête. Mais l'orage se fait de plus en plus menaçant... C'est finalement grâce à la ligne d'écoute « Violences femmes handicapées » de Femmes pour le dire, femmes pour agir (FDFA) que le ciel s'éclaircit. Aujourd'hui libérée de ce fardeau, Sylvie affirme « se sentir bien, tranquille ». Cinq ans après avoir créé le premier numéro dédié aux femmes handicapées victimes de violence, l'association lance un tout nouveau site pour briser ce « cycle infernal » qui toucherait 80 % d'entre elles, à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, le 25 novembre 2020.

Des ressources accessibles à tous

La vocation de ce site ? Etre un soutien pour ces femmes et leurs proches, une vitrine des actions de l'association ainsi qu'un centre de ressources sur le sujet, également destiné aux aidants et aux professionnels qui les côtoient régulièrement. Objectif ? Mettre à disposition des informations pratiques et concrètes pour les « accompagner dans ce combat ». Au programme : études, rapports, ouvrages de référence, textes juridiques, films, reportages... FDFA souhaite partager cette expertise « pour que les violences faites aux femmes handicapées ne restent pas un angle mort des violences sexistes et sexuelles ». « Accessible à 90 % », le site dispose de plusieurs fonctionnalités qui facilitent la navigation des personnes malvoyantes, notamment : dictée et synthèse vocales, caractères agrandis, changement de contraste... Les internautes dyslexiques peuvent également accéder à une police spécifique et les personnes en situation de handicap mental à des supports en Facile à lire et à comprendre (FALC). Autre outil clé : le bouton « Quitter le site rapidement » qui ferme aussitôt la page web et efface l'historique de navigation. « Ce site est le fruit d'un travail collectif qu'il faut enrichir avec vos propositions, remarques et ajouts », interpelle Danielle Michel-Chic, coprésidente de FDFA, à l'écoute d'idées innovantes. « Depuis 2017, l'affaire Weinstein a entraîné une énorme vague de libération de la parole », se félicite Hélène Bidard, adjointe à la maire de Paris en charge de l'égalité femmes-hommes, qui affirme soutenir « la création de ce site participant à cette évolution majeure ».

Le dispositif d'écoute toujours actif

Si le local de FDFA est actuellement fermé, mesures sanitaires obligent, sa ligne d'écoute reste joignable au 01 40 47 06 06, aux horaires habituels : le lundi de 10h à 13h et de 14h30 à 17h30 et le jeudi de 10h à 13h. En 2019, plus de 2 000 appels ont été reçus par une dizaine d'écoutantes, « spécialistes des violences faites aux femmes ». « Notre formation nous a permis d'avoir une approche à la fois globale et particulière de toutes les situations que nos interlocutrices pourraient rencontrer, explique l'une d'elles. Dans un premier temps, nous les écoutons avec toute la bienveillance possible, sans aucun jugement, puis nous les orientons vers des services extérieurs au plus proche de leur domicile ou leur proposons une permanence en interne. » « Durant le premier confinement, nous avons dû suspendre notre ligne d'écoute pendant quatre semaines avant de trouver une solution pour la remettre en activité mais aujourd'hui tout est réglé », affirme Isabelle Dumont, chargée de mission au sein de l'asso, qui a observé une recrudescence des appels au moment du déconfinement, « lorsque l'auteur des violences était moins présent au domicile ». Après une période assez calme, depuis le reconfinement les coups de téléphone ont repris de plus belle. Motif majeur ? Les violences conjugales, qui représentent 60 à 70 % des appels contre 40 % habituellement. L'isolement devient alors un véritable calvaire pour celles qui se retrouvent à la merci de leur bourreau 24 heures sur 24.

Porter plainte

En parallèle, l'association propose des ateliers de reconstruction d'estime de soi et offre quatre consultations à ses adhérentes : avec une assistante sociale (pour les accompagner dans leurs démarches administratives), une écrivaine publique (pour rédiger des correspondances, parfois délicates, avec l'administration), une psychologue et une avocate. A noter que les permanences sociale et juridique sont maintenues en période de confinement, par téléphone. Ici, toutes les collaboratrices sont des femmes. « Etre confronté à un homme peut être un frein qui empêche la libération de la parole », explique Isabelle Dumont. Rappelons qu'en France, une femme meurt tous les deux jours, en moyenne, sous les coups de son (ex-)conjoint et qu'une victime de féminicide sur trois avait déposé plainte... classée sans suite. De même, sur 1 000 viols, seules 100 personnes portent plaintes, et 73 sont classés sans suite par manque de preuves. Au final, seule une plainte sur 100 aboutit à une condamnation. Pour encourager les femmes, à « Porter plainte », Sophie Savattier, étudiante en cinéma, a réalisé un film éponyme (ci-contre) lors de son stage au sein de FDFA. Une vidéo de 4 minutes qui se veut réaliste, « minimaliste », pour leur permettre de s'identifier et d'aller au bout de cette démarche « parfois si dissuasive ». « Il est important d'expliquer son handicap aux représentants des forces de l'ordre. Ce n'est pas obligatoire mais cela peut les aider à comprendre votre situation », souligne notamment le film. Et de rappeler : « Vous n'êtes jamais coupable des violences que vous subissez et il n'y a aucune honte à les expliquer ».

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Cassandre Rogeret, journaliste Handicap.fr"
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