Dernière minute du 9 mars 2021 à 17h45
Victoire attendue de longue date. Après plus de deux heures de débat, les Sénateurs réunis en séance publique ont adopté la proposition de loi permettant de ne plus tenir compte des revenus du conjoint dans le calcul de l'AAH.
Sur proposition de la commission des affaires sociales le 3 mars, les sénateurs ont ainsi accepté le principe d'une déconjugalisation du calcul de l'AAH en rétablissant le principe d'un plafonnement (COM-4 du rapporteur – art. 3) et mis en place un régime transitoire de dix ans pour les ménages actuellement bénéficiaires de l'AAH qui seraient perdants à la réforme (COM-5 du rapporteur – insérant un art. add. après l'art. 3). En effet, selon la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), la mesure proposée ferait aussi un grand nombre de ménages perdants : environ 44 000, dont 21 % perdraient totalement le bénéfice de la prestation (consulter l'infographie).
En outre, ils ont modifié le texte pour exclure les primes versées par l'État aux sportifs de l'équipe de France médaillés aux Jeux paralympiques du calcul du plafond de ressources d'attribution des différentes prestations sociales versées aux personnes en situation de handicap (amt 3 rect. – insérant un art. additionnel après l'art. 4). Ce texte doit maintenant être à nouveau soumis aux députés, en deuxième lecture.
Article initial du 4 mars 2021
Les sénateurs ont accepté, le 3 mars 2021, en commission, le principe d'une désolidarisation de l'Allocation adulte handicapé (AAH) des revenus du conjoint, votée à l'Assemblée nationale en première lecture en février 2020, contre l'avis du gouvernement et de la majorité. Le texte sera examiné en première lecture le 9 mars dans l'hémicycle du Sénat, à majorité de droite.
Revendication majeure des associations
La suppression de la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de cette allocation est une demande forte des associations de défense des droits des personnes handicapées et des associations féministes. Cette revendication a fait l'objet d'une pétition sur le site du Sénat, qui a dépassé les 100 000 signatures, la première à atteindre ce seuil conditionnant la possibilité d'une inscription à l'ordre du jour de la chambre haute.
Une allocation hybride
La commission des Affaires sociales du Sénat s'est saisie d'une proposition de loi des députés Libertés et Territoires "portant diverses mesures de justice sociale", dont l'AAH, pour donner "une réponse" à cette pétition, a indiqué à la presse sa présidente Catherine Deroche (LR). Depuis sa création en 1975, l'AAH "a toujours eu un caractère hybride, entre minimum social et prestation de compensation", a souligné le rapporteur LR Philippe Mouiller.
Une enveloppe de 560 millions d'euros
Les sénateurs ont "choisi de trancher" en faveur de la seconde proposition, en acceptant la "déconjugalisation" du calcul de l'AAH. Ils ont toutefois modifié la rédaction des députés pour réintroduire le plafonnement du cumul de l'AAH avec les ressources propres du bénéficiaire. Le dispositif ainsi réécrit aurait un coût évalué à 560 millions d'euros, selon M. Mouiller, contre 20 milliards dans la version votée par les députés.
44 000 perdants
D'un montant de 900 euros mensuels (maximum pour une personne seule), l'AAH compte aujourd'hui plus de 1,2 million de bénéficiaires, dont 270 000 sont en couple. Selon des estimations de la Drees, la déconjugalisation de l'AAH ferait 44 000 ménages perdants, a précisé M. Mouiller. Le rapporteur a donc prévu "un mécanisme transitoire" de 10 ans, pour permettre aux bénéficiaires de l'AAH qui seraient perdants de conserver le mode de calcul actuel (article complet en lien ci-dessous).
En 2018, le Sénat s'était opposé à une proposition de loi du groupe CRCE à majorité communiste visant à supprimer la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de l'AAH.