Après 5h55 d'effort et de foulée à travers New York, Frédéric Lazaro, amputé fémoral et Pierre-Philippe Gerbelot, son prothésiste, entrevoient enfin la ligne d'arrivée à l'entrée de Central Park, au coin de la 66e rue. Bras dessus, bras dessous, les deux comparses franchissent la ligne d'arrivée des 42,195 km le 5 novembre 2023. Après le marathon de Paris 2022 en 5h59, les deux sportifs ont défié la version américaine, réputée plus difficile, en quatre minutes de moins. Leur objectif était de terminer leur course en moins de six heures, temps maximum pour être reconnu marathonien. Pendant la course, les deux sportifs, affublés de t-shirt aux couleurs de Schaeffler Orthopedie, la société de Pierre-Philippe Gerbelot, n'ont cessé de se soutenir pour franchir la ligne d'arrivée ensemble.
Un marathon de sensibilisation
Outre le défi sportif de taille, ce marathon new-yorkais était l'occasion de visibiliser une profession en difficulté, celle des orthoprothésistes. « Si les patients en situation de handicap ou en perte d'autonomie sont de mieux en mieux suivis, s'ils sont soutenus par des appareillages de plus en plus confortables et technologiquement élaborés et mis en lumière par les Jeux paralympiques à venir, la profession d'orthoprothésiste reste sous haute tension », affirme l'Union française des orthoprothésistes (UFOP) qui soutenait le défi des deux sportifs. Les quelques 1 300 professionnels français réclament une revalorisation a minima de 10 % des tarifs réglementés en orthoprothèse bloqués depuis 2017. « Il ne s'agit pas d'une augmentation mais bien d'un rattrapage. C'est le minimum requis pour assurer l'avenir de la profession et pérenniser l'efficience du suivi des patients », complète l'UFOP.
14 000 euros pour une prothèse sur-mesure
En effet, la prise en charge de leurs équipements sportifs reste minimale voire quasiment inexistante. Lors de la Conférence nationale du handicap (CNH), en avril 2023, le gouvernement a néanmoins promis le « financement des prothèses pour la pratique sportive, en particulier les lames de course ». A titre d'exemple, celle sur-mesure avec laquelle Frédéric a couru s'élève à plus de 14 000 euros, un coût qui freine de nombreuses personnes en situation de handicap dans la pratique sportive (Lire : 20 000 euros la prothèse de sport... non remboursée!). Avec l'inflation, Pierre-Philippe Gerbelot et l'ensemble de ses confrères déplorent également des difficultés à se rémunérer face à l'augmentation des coûts de fabrication des orthoprothèses. Quelques heures avant de démarrer leur marathon, Frédéric Lazaro et Pierre-Philippe Gerbelot s'exprimaient au micro de RTL, expliquant vouloir « mettre en avant ce combat dans la perspective des JO et laisser des traces pour sensibiliser les pouvoirs publics dans cette prise en charge ». Il leur reste dix mois pour boucler ce marathon de sensibilisation.