« 33 degrés dans mon appartement. L'ascenseur encore en panne – c'est d'autant plus fréquent en été. Impossible de sortir seule. La chaleur me cloue sur place. » Pour Martine, une francilienne de 72 ans en situation de handicap moteur et vivant seule, chaque épisode de canicule est une épreuve. Fatigue intense, maux de tête, déshydratation, désorientation, voire pertes de connaissance… Les conséquences de la chaleur sur l'organisme peuvent être rapides et sévères, notamment pour les personnes handicapées, souvent plus sensibles aux variations extrêmes de température. Difficultés à réguler leur température corporelle, troubles de la motricité ou de la communication, besoin d'un appareillage électrique (lit médicalisé, respirateur) sont autant de facteurs aggravants. Et quand l'isolement s'ajoute à ces fragilités, le risque devient d'autant plus important. Alors comment éviter la surchauffe ?
Ligne verte, visite des services sociaux...
Plusieurs outils sont déployés par les communes et les pouvoirs publics pendant les périodes de vigilance canicule : ligne verte gratuite (0 800 06 66 66), alertes météo, points de fraîcheur accessibles... Les personnes en situation de handicap peuvent aussi demander à figurer sur le registre communal des personnes vulnérables, tenu par le Centre communal d'action sociale. Ce dispositif gratuit permet d'être contacté, voire visité, par des agents du CCAS ou de la mairie en cas d'alerte, en particulier lors des pics de chaleur (niveau 3 ou 4 du plan canicule). Leur mission ? S'assurer que tout va bien, rappeler les consignes de prévention, évaluer les besoins éventuels.
Des gestes simples pour rafraîchir le quotidien
Maintenir un logement frais est souvent plus difficile qu'il n'y paraît, surtout lorsqu'on ne peut pas ouvrir les fenêtres ou se déplacer facilement. Plusieurs gestes simples peuvent néanmoins faire la différence : fermer volets et rideaux en journée, aérer très tôt le matin et la nuit, suspendre un drap humide devant une fenêtre entrouverte, placer une bouteille d'eau glacée devant un ventilateur… Côté hydratation, mieux vaut boire régulièrement de petites quantités, même sans soif. L'eau gélifiée peut être utile en cas de troubles de la déglutition. Porter des vêtements clairs, éviter les efforts physiques, organiser les sorties en dehors des heures les plus chaudes (11h–17h) : autant de réflexes à intégrer dans la routine estivale.
La solidarité, premier rempart contre les coups de chaud
Un appel, une visite, un message suffisent parfois à repérer une alerte invisible. Familles, voisins, professionnels de santé, auxiliaires de vie… Tous ont un rôle à jouer pour veiller, échanger, rassurer. À Paris, la Ville mobilise les maraudes sociales, met à disposition des espaces rafraîchis, distribue des gourdes et sensibilise les publics isolés. À l'instar d'autres communes, la Capitale a également commencé à former des bénévoles à la communication FALC (Facile à lire et à comprendre) pour s'adresser plus facilement aux personnes avec un handicap mental.
Une info accessible : le rôle du FALC dans la prévention
Comprendre les bons gestes est une condition essentielle pour se protéger. Encore faut-il que l'information soit lisible, concrète et accessible. C'est tout l'objectif du poster en FALC "Je reste en bonne santé pendant la canicule", conçu par l'association Coactis Santé (Des recommandations en FALC pour lutter contre la canicule). Au programme, messages courts, pictogrammes explicites et consignes claires : « À la maison, je bois de l'eau régulièrement. Je ne bois pas d'eau glacée. Je ne bois pas d'alcool. » « Si je sors, je protège ma tête avec un chapeau, je mets de la crème solaire... » « Si je ne me sens pas bien (fatigue, fièvre, vertiges), j'appelle mon docteur. » Des informations simples mais qui peuvent sauver des vies ! « Cet outil peut être téléchargé et imprimé librement par tous ceux qui veulent diffuser des messages de prévention santé. Il est également affiché actuellement dans de nombreux lieux d'accueil du public : écoles, hôpitaux, salles municipales, maisons de retraite… », expliquent Anne Charlotte Dambre, co-déléguée de l'association Coactis santé, et Sophie Lemarié, experte SantéBD et orthophoniste intervenant auprès d'enfants avec troubles du spectre de l'autisme.
Améliorer la réponse publique face à la chaleur
Chaque été, les épisodes caniculaires mettent en lumière des failles : registres incomplets, informations mal relayées, logements inadaptés, formation insuffisante des aidants. Pourtant, les pistes d'amélioration sont connues : renforcer la diffusion d'outils accessibles, encourager les communes à communiquer précocement et largement, proposer des aides matérielles pour mieux équiper les logements (ventilateurs, brumisateurs, domotique simple), et intégrer systématiquement la question du handicap dans les plans canicule. Alors que les étés deviennent plus rudes et plus longs, il ne s'agit plus seulement d'alerter, mais d'agir collectivement. Mobiliser les réseaux de proximité, adapter les supports d'information, penser aux besoins spécifiques de chacun… La canicule est un défi environnemental, mais aussi un test de solidarité.
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