* Défenseur des droits
Près de 46 000 adolescents se suicident chaque année dans le monde (OMS 2019). Outre le passage à l'acte, les idées noires, les troubles de l'humeur et le sentiment d'anxiété sont en hausse ces dernières années. Pourtant, seulement 2 % des budgets publics mondiaux alloués à la santé sont affectés à la santé mentale. En France aussi la (pédo)psychiatrie demeure l'un des parents pauvres de la médecine. Alors que 2022 a été désignée Année européenne de la jeunesse, la Défenseure des droits (DDD), Claire Hédon, et son adjoint le Défenseur des enfants, Eric Delemar, appellent en juin 2022 la Première ministre, Elisabeth Borne, à faire de ce sujet une priorité... Pour la seconde fois !
La pandémie, boosteur d'anxiété
En effet, déjà en novembre 2021, dans son rapport annuel consacré aux droits de l'enfant (article en lien ci-dessous), la DDD avait alerté sur la « gravité de la situation dans laquelle sont plongés de nombreux jeunes » et ses conséquences. En effet, les troubles psychiques diagnostiqués (notamment le trouble déficitaire de l'attention/hyperactivité (TDA/H), l'anxiété, les troubles bipolaires, du comportement ou alimentaires, la dépression ou encore la schizophrénie) peuvent avoir des « effets néfastes considérables sur la santé, l'éducation, la qualité de vie et la capacité à obtenir un revenu ». Et les deux années de vague épidémique n'ont rien arrangé... Le confinement et les restrictions d'accès aux centres culturels, sportifs et de loisirs, ainsi que l'atmosphère d'incertitude et la réduction des interactions sociales, indispensables à la construction psychique, ont mis à mal la santé mentale des jeunes, a fortiori ceux qui se trouvaient déjà en situation de vulnérabilité (maladie, handicap, pauvreté...).
L'intérêt supérieur de l'enfant, unique boussole
Pour changer la donne, Claire Hédon implore de considérer la pédopsychiatrie comme « une discipline prioritaire ». Selon elle, l'arrivée des enfants dans les structures pédopsychiatriques hospitalières pour tentatives de suicide est un moment décisif pour leur prise en charge. Pourtant, certaines continuent de fermer des lits dans ce service par manque de personnels et de moyens. Résultat : de nombreux enfants se rendant aux urgences après une tentative de suicide se retrouvent face à une absence de places disponibles et ne sont donc pas hospitalisés, ou alors dans un service de psychiatrie adulte, entraînant une prise en charge non adaptée. Il s'agit d'une « entrave au bon développement de l'enfant et à son intérêt supérieur », consacré par la Convention internationale des droits de l'enfant, rappelle Claire Hédon. Selon elle, cette notion doit être « l'unique boussole » pour la prise en charge de la souffrance.
29 recommandations dont 2 spécifiques au handicap
Six mois après la publication de son rapport, la DDD rappelle donc ses 29 recommandations pour améliorer la santé mentale des jeunes, dont deux concernent spécifiquement ceux en situation de handicap : renforcer les moyens de l'école inclusive afin que tous puissent être orientés dans les établissements adaptés à leurs besoins et aient accès aux aides notamment humaines mais aussi rendre obligatoire un minimum d'heures de formation à leur accueil, dans le cadre de la formation continue, pour tous les enseignants déjà en poste. Claire Hédon exhorte le nouveau gouvernement à « agir urgemment pour sortir des approches fragmentaires et strictement sanitaires » et à mettre en place un plan d'action. Une bouteille à la mer ?