Par Véronique Martinache
Congé de 15 jours en cas de décès d'un enfant de moins de 25 ans, versementautomatique d'une allocation forfaitaire, maintien des prestations familiales, notamment l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, pendant un délai déterminé... Le texte comporte désormais un éventail de dispositions pour améliorer les droits sociaux des familles endeuillées.
Des parents peu soutenus
"La perte d'un enfant est sans doute l'un des événements les plus bouleversants qui puissent affecter une existence (...) Pourtant, les parents (...) restent peu soutenus par les pouvoirs publics" : la rapporteure Elisabeth Doineau (centriste) a posé les termes du débat en commission. A l'Assemblée, les députés marcheurs avaient provoqué une vague d'indignation en rejetant, suivant la ministre du Travail Muriel Pénicaud, la mesure phare d'une proposition de loi UDI-Agir qui proposait l'allongement du congé de deuil d'un enfant de cinq à douze jours (article en lien ci-dessous). La ministre avait notamment mis en avant que le texte ne reposait pas sur la solidarité nationale, mais sur un congé "payé 100% par l'entreprise".
Faire preuve d'humanité
Ce rejet avait été dénoncé par les oppositions comme "une honte", "une forme de technologie froide", et le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux avait demandé un nouveau vote. Emmanuel Macron était alors intervenu lui-même pour faire cesser le trouble appelant le gouvernement à "faire preuve d'humanité". Le gouvernement avait reconnu une "erreur" et le Premier ministre Edouard Philippe avait appelé à "améliorer encore ce texte". Les élus LREM avaient ainsi surenchéri, proposant de porter le congé pour deuil d'enfant à quinze jours ouvrés. L'examen du texte en première lecture au Sénat, dominé par l'opposition de droite, sera donc l'occasion de remettre les choses à plat, avant son retour à l'Assemblée nationale dans un contexte qui a considérablement évolué. En commission, les sénateurs l'ont déjà adopté "à l'unanimité", a indiqué Mme Doineau à l'AFP, avec les modifications proposées à la fois par la rapporteure et le gouvernement.
En commission, les sénateurs ont ainsi porté de cinq à sept jours le congé actuellement prévu par le code du travail et créé un "congé de répit" de huit jours supplémentaires fractionnable, pour partie pris en charge par la Sécurité sociale. L'âge limite du jeune décédé a été fixé à 25 ans. Ce congé est étendu aux travailleurs indépendants et aux agents publics.
6 500 décès par an
Sur le modèle des dispositions protégeant les mères après un congé de maternité, a été introduite une mesure de protection contre le licenciement pour les salariés pendant un délai de treize semaines suivant le décès d'un enfant. Le texte adopté en commission prévoit également le maintien des droits aux prestations familiales (allocations familiales, complément familial, allocation d'éducation de l'enfant handicapé...) pendant un délai déterminé après le décès d'un enfant, qui pourrait être de trois mois, selon la rapporteure, ainsi que le maintien de la prise en compte de l'enfant au titre des droits au revenu de solidarité active (RSA). Aujourd'hui, les droits cessent le mois suivant le décès de l'enfant. Le texte crée en outre une allocation forfaitaire versée automatiquement aux familles en cas de décès d'un enfant à charge, dont le montant sera fixé par décret. Le texte reprend encore le mécanisme de don de jours de repos entre salariés (article en lien ci-dessous), déjà voté à l'Assemblée, et introduit une expérimentation de prise en charge psychologique des parents.
6 500 enfants et jeunes de moins de 25 ans sont morts en France en 2017, dont environ 2 700 âgés de moins d'un an et 2 400 âgés de 15 à 24 ans, selon les données de l'Insee.