Paralysie cérébrale: une filière nationale en 2026... enfin?

La France se dote en 2026 d'une filière nationale dédiée à la paralysie cérébrale, composée d'un centre de référence et de quatre pôles territoriaux. Un maillage inédit pour réduire les inégalités et assurer un accompagnement tout au long de la vie.

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Un jeune avec paralysie cérébrale en séance de rééducation avec une femme.

« Un enfant naît toutes les six heures avec une paralysie cérébrale dans l'Hexagone. 125 000 personnes vivent avec ce handicap moteur. Il était temps ! », réagit Alain Chatelin, président de la Fondation paralysie cérébrale. Le 24 juillet 2025, la ministre Charlotte Parmentier-Lecocq a officialisé la création d'une filière nationale dédiée à la première cause de handicap moteur en France. « Ne pas agir reviendrait à entretenir des inégalités inacceptables dans un pays fondé sur un modèle de protection sociale universelle », affirme-t-elle. Objectif ? Mettre fin à l'errance des familles, améliorer la formation des professionnels et proposer un accompagnement adapté de la naissance à l'âge adulte.

Bientôt un centre par région ?

Dès 2026, la filière reposera sur un centre national de référence (CNR) et quatre centres territoriaux. Le premier centralisera l'expertise, les bonnes pratiques et les ressources ; les seconds structureront la coordination locale, soutiendront les situations complexes et animeront la recherche et la formation. « Le CNR est davantage une équipe nationale qu'un lieu physique », précise le Pr Sylvain Brochard, professeur des universités – praticien hospitalier en médecine physique et réadaptation pédiatrique au CHU de Brest. À terme, l'objectif est de mettre en place un centre par région, « au minimum », annonce-t-il. « Une avancée majeure » qui « réduira les inégalités territoriales » et offrira « les mêmes chances d'accompagnement » partout en France, se réjouit Mamady Kaba, président de la Fédération paralysie cérébrale France.

Cap sur le projet de vie !

Changer d'échelle, c'est aussi changer de logique. « Structurer progressivement cette filière est un enjeu majeur pour garantir un parcours de soins équitable, lisible et efficace, depuis le repérage précoce jusqu'à l'accompagnement tout au long de la vie », souligne la ministre. Car « on ne guérit pas de la paralysie cérébrale à 20 ans : à cet âge, on s'élance dans la vie et on a plus que jamais besoin de soutien ». L'enjeu est donc de mettre fin au cloisonnement enfant/adulte, de créer des ponts entre sanitaire et médico-social et de mettre le cap sur le projet de vie. « Regarder le soin sans penser au parcours et au projet de vie est un non-sens », insiste la Pr Carole Vuillerot, spécialiste de la réadaptation pédiatrique aux Hospices civils de Lyon.

Familles et adultes : de l'errance à l'espoir

Pour les familles, la filière représente un tournant. « Le parcours de soins est un labyrinthe : portes fermées, doutes, solitude… Cette structure, c'est l'espoir d'avoir enfin des repères clairs et d'être accompagnés tout au long du parcours de vie », souffle Delphine Ganne, maman de Martin, atteint de paralysie cérébrale. « J'espère que les familles seront pleinement reconnues comme actrices à part entière. »

Du côté des adultes concernés, la réalité est tout aussi brute : « J'ai dû aller en Espagne pour trouver un suivi rééducatif adapté. C'est épuisant », confie Béatrice Hamel, 22 ans, étudiante. Pour elle, ces centres doivent « rompre les inégalités territoriales » et permettre de « se concentrer sur la vie sociale, le travail plutôt que de se battre pour des soins » et « s'épanouir en tant que citoyen ».

C'est précisément ce vide que la filière entend combler, insiste Alain Chatelin : « Aucune mesure n'était envisagée pour les adultes. La légitimité des besoins et des réponses que nous apportions collectivement a fini par convaincre la ministre ». « C'est la force de l'union des acteurs du Livre blanc de la paralysie cérébrale qui a permis d'aboutir à ce projet », se félicite le président.

Former les professionnels de santé

Les attentes des professionnels sont tout aussi fortes. « Beaucoup de soignants n'ont pas de formation spécifique à la paralysie cérébrale. La filière doit permettre une vraie montée en compétences, le partage de ressources et le développement de pratiques innovantes comme les thérapies intensives », plaide Michel Marciset, directeur général d'Envoludia, association qui accompagne des personnes avec paralysie cérébrale. La ministre en fait une « priorité », convaincue que mieux former les équipes permettra, à terme, d'offrir aux personnes concernées des réponses adaptées à chaque étape de la vie et sur l'ensemble du territoire.

Un chantier à construire, pas à pas

La dynamique est lancée. Un responsable « paralysie cérébrale » doit être désigné au sein de la DGOS (administration du ministère de la Santé chargée de l'organisation des soins), pour piloter la mise en œuvre ; des groupes de travail s'organisent, même si le budget et le calendrier précis restent à définir. « Les débuts de cette filière nationale sont les piliers, les fondements de l'architecture nationale et territoriale nécessaire à la mise en place d'une stratégie nationale ambitieuse telle qu'attendue depuis trop longtemps par les familles et professionnels du secteur », résume le Pr Brochard. Le chemin sera long, mais une certitude s'impose déjà : la paralysie cérébrale est « enfin » reconnue comme une priorité nationale.

© Ferrantraite de Getty Images Signature

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Cassandre Rogeret, journaliste Handicap.fr"
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