Les représentants des entreprises adaptées, destinées aux travailleurs handicapés, ont signé le 12 juillet 2018 avec l'État un "engagement mutuel" dont la principale ambition est de doubler les embauches dans ce secteur d'ici 2022 grâce à des financements publics supplémentaires.
40 000 emplois en plus d'ici 2022
L'objectif est de "permettre à 40 000 personnes handicapées supplémentaires d'avoir accès à un emploi d'ici à 2022", pour atteindre 80 000, a expliqué la ministre du Travail Muriel Pénicaud, en paraphant avec l'Union nationale des entreprises adaptées (Unea), l'APF France Handicap et l'Unapei un "engagement national" pour "l'entreprise inclusive 2018-2022". Selon le texte, consulté par l'AFP, les signataires s'engagent à mettre en oeuvre d'ici la fin du quinquennat plusieurs actions pour "redimensionner" ce secteur et lui permettre de lutter contre le chômage des personnes handicapées.
Des entreprises "ordinaires"
Entretien d'espaces verts, nettoyage de bureau, recyclerie informatique, destruction de documents confidentiels, câblage... Les entreprises adaptées sont réservées aux travailleurs handicapés qui auraient des difficultés en milieu dit "ordinaire". Elles emploient au moins 80% de salariés handicapés, avec des contrats de droit commun, et tous sont payés au moins le Smic. Actuellement, plus de 500 000 travailleurs handicapés cherchent un emploi, et leur taux de chômage, de 19%, est deux fois plus élevé que celui de la population dans son ensemble.
Quelles mesures ?
L'engagement va permettre la mise en place d'expérimentations telles que la création d'un contrat à durée déterminé "tremplin", de 24 mois maximum, permettant aux personnes handicapées d'acquérir une expérience professionnelle les conduisant vers l'emploi durable, ou encore la possibilité pour les entreprises adaptées de proposer du travail temporaire, notamment "des missions aux personnes les plus éloignées de l'emploi". L'État s'engage à un "effort budgétaire" pour atteindre, "avec le concours d'autres financeurs, un budget de plus de 500 millions d'euros à horizon 2022". Pour la secrétaire d'État chargée des Personnes handicapées, Sophie Cluzel, cette réforme permettra de "mieux associer les entreprises du milieu adapté et celles du milieu ordinaire pour accueillir davantage de jeunes". Selon l'Unea, le secteur perçoit actuellement 379 millions d'euros annuels et embauche 35 000 personnes.
Réactions des asso
Du côté des associations, réactions contraires. L'Apajh assure que, si elle reconnaît l'intérêt de certaines mesures, ne "signera pas cette convention". Avec ces dispositions jugées "alléchantes sur le papier mais questionnant à terme les droits des salariés en situation de handicap", elle "s'interroge fortement sur l'avenir des entreprises adaptées de petite taille, souvent rurales, pour qui l'accord sera difficile à mettre en œuvre à la fois pour la mixité stricte des salariés mais aussi pour la fluidité des parcours". En outre, elle rappelle que cette signature intervient peu de temps après qu'un arrêté modifie les modalités de calcul de la subvention spécifique attribuée aux entreprises adaptées (article en lien ci-dessous). "Une subvention pourtant très utile pour soutenir l'investissement des EA ou la rénovation des locaux par exemple", déplore Jean-Louis Garcia, son président. En effet, fin 2017, l'Unea et plusieurs associations s'étaient émues d'une mesure de la loi de Finances 2018 plafonnant une partie des aides financières qui leur étaient apportées. Leur appel a conduit à organiser une concertation avec les pouvoirs publics, aboutissant à cette convention dont le cadre juridique sera concrétisé par amendements au projet de loi pour la "Liberté de choisir son avenir professionnel", actuellement débattu au Sénat. "Doubler le nombre d'emplois est un objectif ambitieux qui répond à un défi social fort", ont réagi dans un communiqué l'Unea, l'APF France handicap et l'Unapei, assurant que "les 800 entreprises adaptées en France joueront pleinement leur rôle d'acteur de la société inclusive".
Photo : Twitter Sophie Cluzel