30% de sans-abri avec un trouble psy: mieux les accompagner

Quelques aides pour accompagner les personnes en situation de grande précarité avec des troubles psychiques. Trop peu, selon la HAS qui publie ses recommandations de bonnes pratiques. L'enjeu ? Un accompagnement sanitaire et social de qualité.

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Garantir l'accès à un parcours de santé, d'insertion sociale et de vie citoyenne aux personnes en situation de grande précarité avec des troubles psychiques, c'est l'ambition de la Haute autorité de santé (HAS). Le 18 janvier 2024, elle publie ses recommandations de bonnes pratiques, destinées à la fois aux professionnels qui les encadrent et aux pouvoirs publics « appelés à les soutenir ». Objectif ? Offrir un accompagnement sanitaire et social « de qualité ».

Grande précarité : 75 % de personnes avec des troubles psy

Les populations en situation de grande précarité ne cessent de croître depuis vingt ans. Selon la Fondation l'Abbé Pierre, 300 000 personnes seraient sans domicile en France, dont 30 % avec un handicap psychique sévère (enquête Samenta 2010). Ce chiffre grimpe à 75 %* si l'on inclut d'autres troubles comme la dépression, l'anxiété ou le trouble de stress post-traumatique. Les personnes concernées, qui cumulent bien souvent vulnérabilités sociales et psychiques, problèmes somatiques et situations administratives complexes, rencontrent de multiples obstacles pour accéder aux soins et sont souvent stigmatisées. « Malgré l'existence de dispositifs d'aide et les diverses initiatives mises en œuvre aux niveaux national et local, les réponses apportées restent encore insuffisantes », observe la HAS.

8 fiches outils détaillées

Pour changer la donne, elle assortit ses recommandations de huit fiches outils : cinq précisent les actions des divers intervenants (équipes sociales, de psychiatrie, de soins primaires, administration...) et trois développent des situations particulières (hospitalisation en psychiatrie, prévention et interventions précoces, recours aux pairs-aidants). Le sujet de la pair-aidance fera d'ailleurs l'objet d'une recommandation de la HAS courant 2024, annonce-t-elle.

Priorité à l'accès au logement

L'autorité recommande notamment de mettre en place des « solutions intégrées » combinant l'accès à un « chez soi » (logement ou solution d'hébergement digne) et un accompagnement adapté (clinique et social). Le programme « Un chez soi d'abord » offre, par exemple, un accès direct à un logement, tandis que les « résidences accueil » proposent des logements dans un cadre de vie semi-collectif. L'enjeu ? Aider les personnes à se rétablir, tout en développant un réseau de professionnels référents, mais aussi les encourager à tisser des liens sociaux et à envisager des projets personnels.

Repérer les vulnérabilités précocément

Pour anticiper les difficultés, la HAS exhorte à repérer les vulnérabilités psychosociales chez les personnes ayant un logement afin d'en éviter la perte. Impayés de loyer, troubles du voisinage, personnes « disparaissant des radars » sont autant de signaux d'alerte. L'autorité recommande aux médecins généralistes et autres acteurs de soins primaires d'évaluer la situation sociale de leurs patients (droits sociaux, accès au logement, sources de revenu, etc.), et aux travailleurs sociaux d'aborder la question des besoins d'aide en santé mentale face à une personne manifestement en détresse psychologique.

« Aller vers » les personnes et « rester avec »

« De la qualité des premiers contacts dépend la réussite de l'accompagnement », affirme la HAS. De ce fait, elle exhorte tous les professionnels impliqués à « aller vers » les personnes sur leur lieu de vie, prendre le temps nécessaire à la rencontre. Elle les incite à se montrer disponibles, à réitérer la proposition d'aide en cas de refus (principe du « rester avec ») -sans pour autant imposer- et à éviter au maximum les temps d'attente. « L'aller vers n'est pas une démarche limitée aux équipes spécialisées comme les équipes mobiles psychiatrie précarité (EMPP), c'est une posture professionnelle d'ouverture et d'accueil inconditionnel de la personne 'là où elle en est' », précise la HAS. Il s'agit par exemple, pour les services administratifs, de faciliter les procédures pour simplifier l'accès aux droits ou encore pour les services d'urgence et hospitaliers d'être soutenus par des équipes spécialisées type EMPP.

Soutenir les professionnels

« La mise en œuvre effective de l'ensemble de ces recommandations suppose également que les professionnels disposent de moyens et d'un soutien à la hauteur des besoins de terrain, dans un contexte marqué par des tensions particulières sur les métiers du travail social et du soin (Lire:  Campagne des métiers du soin : secteur en crise recrute !», souligne la HAS. Le risque d'épuisement professionnel étant majeur face à ces situations, elle appelle à développer les dispositifs de soutien et de formation pour les professionnels.

* Hossain et al. Prevalence of mental disorders among people who are homeless : An umbrella review. Int J Soc Psychiatry, 2020  - Gutwinski S, et al. The prevalence of mental disorders among homeless people in high-income countries: An updated systematic review and meta-regression analysis. PLoS Med, 2021

Photo en noir et blanc d’un sans-abri qui courbe le dos et baisse la tête.
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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Cassandre Rogeret, journaliste Handicap.fr"
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