La thérapie génique, un allié « sang » précédent contre la drépanocytose et la bêta-thalassémie ? Ces deux maladies génétiques affectant l'hémoglobine, protéine sanguine servant à transporter l'oxygène et présente dans les globules rouges, appartiennent aux bêta-hémoglobinopathies. Une équipe de chercheurs de l'Inserm, de l'Université Paris Cité et de l'AP-HP au sein de l'Institut Imagine, a montré l'efficacité d'une approche de thérapie génique contre ces deux pathologies. Le principe ? Réactiver chez les patients la production d'une protéine, la globine fœtale, qui cesse normalement d'être exprimée après la naissance. Leurs résultats « prometteurs » sont publiés dans la revue scientifique Nature Communications (en lien ci-dessous, en anglais).
Des anémies sévères
Chaque année, environ 100 000 enfants naissent dans le monde avec une forme grave de bêta-thalassémie, tandis que la drépanocytose est la première maladie génétique au monde avec cinq millions de personnes touchées. Ces bêta-hémoglobinopathies « sont causées par des mutations sur le chromosome 11 du gène à l'origine de la production de la globine bêta, une protéine constitutive de l'hémoglobine, le principal composant des globules rouges », précisent les chercheurs dans un communiqué. Dans la bêta-thalassémie, la production de globine bêta est drastiquement réduite, causant un déficit en hémoglobine et entraînant des anémies sévères. Dans la drépanocytose, la structure de la globine bêta est altérée, ce qui affecte l'intégrité des globules rouges et entraîne des anémies, des obstructions locales très douloureuses de la circulation sanguine (ou crises vaso-occlusives) et une altération progressive des organes, avec un impact conséquent sur le quotidien.
Des résultats prometteurs sur les animaux
L'équipe de recherche dirigée par Annarita Miccio, chercheuse Inserm au sein de l'Institut Imagine, a réalisé une série d'expérimentations in vitro pour déterminer la stratégie la plus efficace afin de stimuler la production de globine fœtale, « en reproduisant ces mutations bénéfiques par thérapie génique à des fins thérapeutiques ». « L'approche la plus efficace consistait à insérer une mutation génétique générant, dans les globules rouges, un mécanisme moléculaire ayant le double avantage de stimuler la production de globine fœtale et de bloquer le mécanisme inhibant naturellement la production de cette dernière », expliquent les chercheurs. Par ailleurs, ils ont montré l'efficacité sur le long terme de cette stratégie chez l'animal, un résultat, selon eux, « très important dans le cadre d'une application thérapeutique ».
Bientôt un traitement pour l'Homme ?
« De nombreuses étapes sont encore nécessaires avant que cette nouvelle approche soit applicable en clinique », précise Panagiotis Antoniou, premier auteur de l'étude. Les chercheurs doivent par exemple optimiser le protocole pour modifier génétiquement davantage de globules rouges car seuls 60 % le sont avec le dispositif actuel. « Pour autant, nos travaux ouvrent la voie au développement clinique d'un traitement innovant et sûr pour les patients atteints de bêta-hémoglobinopathies, dans l'objectif d'améliorer leur qualité de vie », se félicite le scientifique.
La drépanocytose, systématiquement dépistée à la naissance
Rappelons que, le 15 novembre 2022, la Haute autorité de santé a publié un avis recommandant la généralisation du dépistage de la drépanocytose à l'ensemble des nouveau-nés sur le territoire national (article en lien ci-dessous). Il était, jusqu'alors, le seul dépistage à être ciblé, c'est-à-dire qu'il visait à identifier en priorité les populations les plus à risque de développer la maladie. Or une prise en charge la plus précoce possible permet d'éviter de graves répercussions sur la santé et améliore la qualité de vie.