« Stop aux fake news contre-productives !!! », lâche Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat au Handicap dans un tweet le 30 août 2019. Elle rappelle « Une mobilisation sans précédent pour les élèves en situation de #Handicap. Les associations et le gouvernement doivent travailler ensemble pour accompagner les familles ! ». Cette fake news, selon elle, c'est un communiqué de presse de l'Adapei de la Drôme fin août qui affirme que 257 enfants handicapés ne seront pas pris en charge dans le département à la rentrée, faute de places en établissements médico-éducatifs. Cette annonce avait été largement relayée dans les medias, y compris nationaux, provoquant une vague de réactions.
Un nombre revu à la baisse
A l'heure où le gouvernement promet une rentrée plus inclusive que jamais, Sophie Cluzel s'était alors emparée de ce dossier brûlant et avait annoncé saisir « les autorités compétentes pour évaluer la situation et prendre les mesures appropriées ». L'Adapei 26 avait alors revu son chiffre à la baisse ; finalement seuls 240 enfants étaient concernés. Mais Sophie Cluzel dénonçait le lendemain les procédés de cette association et de son président Jean-Luc Chorier dans un tweet puis sur la chaîne BFMTV : « C'est faux. C'est une fake news complète... Pas un seul enfant n'a pas une solution. (…) Je voudrais dire qu'il faut arrêter d'instrumentaliser l'inquiétude des parents. C'est scandaleux. Ces enfants sont à l'école pour la plupart, certains sont en IME, d'autres ont déménagé, d'autres ne sont absolument pas connus… » Emu par cette accusation, Jean-Luc Chorier s'était exprimé publiquement en confirmant ce chiffre. A deux jours de la rentrée, l'association regroupant des parents d'enfants avec un handicap mental avait organisé une opération « Pyramide de cartables » au pied d'une fontaine de Valence pour alerter le grand public.
Quelles solutions ?
Dans un communiqué, la préfecture de la Drôme a proposé une réunion le vendredi 30 août en présence de toutes les parties, s'engageant à ne « laisser aucun enfant en situation de handicap sans solution de scolarisation ». Un groupe de travail présidé par le préfet doit se tenir « prochainement avec objectif de faire un point individualisé sur les situations en cours. » La préfecture réaffirme que « dans l'attente d'une prise en charge en établissements spécialisés, des solutions temporaires d'accompagnement en milieu scolaire continuent d'être systématiquement proposées aux familles », laissant tout de même planer un doute sur ces options.
Un constat partagé
Pourtant, chacune avec son propre outil, les parties en présence, Etat et associations, semblent admettre cette réalité, celle des « sans solution » ; tandis que le gouvernement lance une cellule d'écoute dans chaque département qui propose d'apporter une première réponse aux situations problématiques dans les 24 heures, l'Unapei, organe national qui fédère les Adapei comme celle de la Drôme, met en ligne une plateforme marentree.org avec l'objectif de recueillir les témoignages de familles confrontées à toutes sortes de difficultés (articles en lien ci-dessous). Un même constat -des enfants resteront certainement sans solution-, un même objectif -résoudre le problème- ! La « fake » ne porterait donc que sur la quantité ?
Des chiffres impossibles à trouver
Dans une tribune parue le 31 août dans le Journal du Dimanche, Luc Gateau, président de l'Unapei, riposte avec des chiffres qui, selon lui, « parlent d'eux-mêmes » mais datent tout de même de 2008 (!) : « 11 000 enfants en situation de handicap sont officiellement sans scolarisation en France ». Officiellement, vraiment ? Dans une interview accordée à handicap.fr, Sophie Cluzel (en lien ci-dessous), affirme en effet que, « tout comme nous, les associations n'ont pas la possibilité de savoir précisément le nombre d'enfants laissés sans solution éducative ». Même si la ministre admet que « nombre d'entre eux n'ont pas encore trouvé la bonne solution, et c'est ça l'enjeu ». La guerre des chiffres aura-t-elle lieu ? En attendant, les témoignages de parents confrontés à des situations compliquées, parfois critiques, continuent d'affluer…