Le 23 mars 2022, de 11 à 13h15, avec le soutien de handicap.fr, un grand débat au sein de la Maison de la radio a réuni les huit principaux candidats à la présidentielle (ou leur représentant) pour confronter leur politique handicap et inclusion (article en lien ci-dessous). Son nom ? Handébat 2022. Marine Le Pen était présente. Pour aller plus loin, les mêmes questions, sur dix grands thèmes, ont été posées à chacun par écrit (autres interviews dispo en lien ci-dessous). Voici les réponses de la candidate du Rassemblement national… ou pas !
Question flash : une mesure emblématique de votre politique handicap ?
Ériger en principe constitutionnel la lutte contre les discriminations du fait du handicap. Cette innovation juridique constituera un levier considérable pour abattre les obstacles qui rendent la vie des personnes en situation de handicap plus difficile que celles de leurs concitoyens, alors que des solutions permettraient de gommer ces entraves. Ce principe sera une déclinaison naturelle du principe d'égalité et un signal fort pour toute la société. L'affirmation du principe constitutionnel de non-discrimination vis-à-vis des personnes en situation de handicap permettra par exemple de lever les obstacles pour acquérir un bien immobilier ou faire de l'accès aux lieux et transports publics un objectif impératif. Le fait qu'elles aient des difficultés, parfois insurmontables, pour accéder à un prêt immobilier ou à la consommation, ou alors en payant des surprimes, constitue une discrimination auquel les dispositifs actuels, comme la convention AERAS (S'assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé), n'apportent pas des réponses toujours satisfaisantes.
1 - CONVENTION INTERNATIONALE DES DROITS DES PERSONNES HANDICAPEES DE L'ONU
• L'ONU exhorte la France, à la suite de son audition à l'été 2021, à fermer tous ses établissements médico-sociaux. Vous engagerez-vous à suivre ce cap ou vous semble-t-il excessif ?
La fermeture de tous les établissements médicaux sociaux est une hérésie, Il y a autant de vies différentes et de besoins différents que d'individus porteurs de handicap. Si le maître mot est l'inclusion, il ne faut pas être naïf, certaines personnes nécessitent un accompagnement quasi permanent, et la fermeture de ces établissements seraient très préjudiciable pour les familles. Il faut au contraire améliorer l'accueil dans ces établissements, augmenter leur nombre, trop de familles étant en attente, et innover dans la prise en charge. Pour cela, il faut de l'ambition et de la volonté politique.
2 – CITOYENNETE
Les personnes handicapées peinent à accéder à la vie publique et à une citoyenneté pleine et entière. Comment changer la donne ? Par exemple :
• Etes-vous favorable à l'instauration de quotas de personnes en situation de handicap sur les listes électorales, à l'image de ce qui existe pour d'autres publics (par exemple parité homme/femme) ?
• Respecterez-vous le quota de 6 % de personnes handicapées dans votre gouvernement, vos cabinets, votre administration ?
Pas de réponse de Marine Le Pen.
3 – RESSOURCES
• Mettrez-vous en œuvre l'individualisation de l'AAH, soutenue par tous les partis d'opposition contre l'avis de la majorité ?
Une personne en situation de handicap ne doit plus être pénalisée pour avoir fondé un foyer. En conséquence, le barème permettant d'établir les droits au titre de l'allocation adulte handicapé ne prendra plus en compte les revenus du conjoint.
• Par ailleurs, cette allocation à taux plein reste, avec 903 euros par mois, en dessous du seuil de pauvreté fixé en France à 1 102 euros en 2021. Comptez-vous l'augmenter à ce niveau pour son million de bénéficiaires ?
Pour qu'une personne en situation de handicap ne soit plus pénalisée lorsqu'elle travaille, les modalités de calcul du montant de l'AAH seront révisées. Le montant minimal de l'AAH sera en outre indexé sur l'inflation. Pour que plus une seule personne en situation de handicap ne vive sous le seuil de pauvreté, les montants de l'AAH et de la MVA (majoration de la vie autonome) seront revalorisés.
Pour mieux marquer la solidarité envers les parents d'enfants en situation de handicap, une part entière fiscale sera attribuée par enfant et ce quel que soit le degré d'invalidité.
4 - EDUCATION
• 4 000 AESH (accompagnants d'élèves en situation de handicap) de plus promis à la rentrée 2022, est-ce suffisant ? Vous engagerez-vous à faire mieux et comment ?
• L'école inclusive a-t-elle ses limites ou est-ce un cap non négociable, quelles que soient les difficultés pour la mettre en œuvre ?
- Tous les enfants qui peuvent être scolarisés doivent l'être, que ce soit en milieu ordinaire ou en Unité localisée pour l'inclusion scolaire (ULIS). Pour y parvenir, le nombre d'accompagnants des élèves en situation de handicap sera adapté aux besoins. Ces nouveaux recrutements seront facilités grâce à la revalorisation de leur statut.
- Les pôles inclusifs d'accompagnement localisé (PIAL), qui doivent favoriser la coordination des aides humaines, pédagogiques et éducatives mises au service des élèves en situation de handicap, seront réorganisés pour améliorer leur prise en charge.
- De nouvelles unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) seront créées. Elles accueillent, dans le premier et second degré, des petits groupes d'élèves présentant des troubles compatibles et ce au sein d'une école, d'un collège ou d'un lycée ordinaire.
- Les moyens du plan autisme de 2018 seront renforcés. Ainsi, chaque département sera doté d'un centre de dépistage des jeunes autistes alors que seulement deux tiers en sont actuellement pourvus.
- Trop nombreuses sont les familles qui sont obligées de chercher une solution pour leur enfant à l'étranger. Cette situation de carence est proprement inhumaine. Au cours de la période 2022-2027, 10 000 places d'accueil seront créées dans des établissements spécialisés en France afin de résoudre ce problème majeur.
- Pour mieux apporter l'appui de la solidarité nationale aux aidants, qui sont entre 8 et 11 millions, le montant des aides qui leur sont versées par la CAF sera augmenté, et la durée pendant laquelle elles sont perçues sera allongée.
• Que proposez-vous pour faciliter la mobilité internationale des étudiants en situation de handicap ?
Pas de réponse.
5 - EMPLOI
500 000 personnes handicapées sont au chômage. Jugez-vous que « nul n'est inemployable » ? Si oui, faut-il viser l'emploi en milieu ordinaire ou renforcer les dispositifs spécifiques, type Esat ?
• Trois mesures phares pour l'emploi des personnes handicapées et comment comptez-vous les financer ?
- Nul n'est inemployable. Les personnes en situation de handicap doivent pouvoir accéder à des parcours professionnels au même titre que l'ensemble de nos concitoyens. Pour y parvenir, les centre de formation d'apprentis (CFA) seront fortement incités par les pouvoirs publics à accueillir davantage de personnes en situation de handicap. L'alternance, grâce aux contrats de professionnalisation ou d'apprentissage, étant des voies d'insertion professionnelles efficaces, il convient que les personnes en situation de handicap puissent intégrer ces dispositifs plus facilement.
- Des mesures fiscales particulières seront prises pour inciter à la création d'entreprises adaptées (EA). En effet, le fait que ces entreprises du milieu ordinaire emploient au moins 55 % de travailleurs handicapés et les recrutent parmi les personnes sans emploi constitue un moyen particulièrement efficace pour améliorer l'emploi des personnes en situation de handicap.
- L'État respectera strictement l'obligation d'emploi de 6 % de personnes en situation de handicap dans l'administration, ses organismes publics et les entreprises dans lesquelles il a des participations. L'État prendra en outre les dispositions les plus à même de faire respecter par tous les employeurs le seuil de 6 %. Un crédit d'impôts de trois années sera accordé aux entreprises qui iront au-delà de leurs obligations légales en matière de recrutement.
6 - ACCESSIBILITE NUMERIQUE
En dépit de la réglementation, de nombreux sites internet, y compris gouvernementaux, ne sont pas accessibles, faisant peser sur les personnes handicapées, pour certaines déjà isolées par les difficultés de déplacement, le poids supplémentaire de la fracture numérique. Acceptez-vous de durcir significativement les sanctions et de mettre en place une autorité de contrôle et de régulation ?
Les sites internet de services publics devront être adaptés pour permettre aux personnes en situation de handicap de les utiliser. Aujourd'hui, seuls 4% de ces sites ont publié leur attestation d'accessibilité qui établit qu'ils sont conformes au référentiel en vigueur. Il faut adapter les logiciels métiers, les rendre plus accessibles. Je lutterai contre la fracture numérique.
7 - CHOC DE SIMPLIFICATION
L'un des principaux credo du gouvernement actuel a été la simplification de l'accès aux droits des personnes handicapées avec, pour la première fois, un grand nombre d'attributions à vie (RQTH, PCH, CMI…) pour certains handicaps. Comptez-vous aller plus loin ?
Simplifier les démarches MDPH, pour être plus efficace, réactif.
8 - HABITAT INCLUSIF
Au risque d'ébranler le système français du tout médico-social, l'habitat inclusif, qui promeut la vie de la personne handicapée au cœur de la cité, fait aujourd'hui une percée. Comptez-vous encourager cette formule qui prône le vivre ensemble, même si cela suppose d'y investir des moyens supérieurs ? Y voyez-vous certaines limites ?
Bien sûr, j'encouragerai cette formule. Encore une fois, il y a autant de configurations que de personnes porteuses de handicap. Mettre la personne handicapée au centre de la cité est une de mes priorités. J'en avais déjà parlé au CCAS de Fréjus.
9 - ACCESSIBILITE DU BATI
• Les Ad'ap (agenda d'accessibilité programmé) ont fixé des échéances et des règles précises pour assurer l'accessibilité des ERP (établissements recevant du public). Or elles ne sont pas respectées car aucune sanction n'est encore tombée. Vous engagez-vous à durcir le ton et comment ?
Il est indispensable, pour permettre aux personnes en situation de handicap de vivre dignement, de lever tous les obstacles auxquels elles sont toujours confrontées. Tous les établissements publics accueillant du public seront accessibles aux personnes en situation de handicap. Les opérateurs de transports publics et les collectivités locales devront améliorer substantiellement l'accessibilité des transports publics et rendre la voirie, notamment les trottoirs, compatibles avec les déplacements des personnes en situation de handicap.
• La Loi ELAN, ayant fait passer le nombre de logements accessibles de 100 à 20 %, suscite la colère des associations. Comptez-vous revenir sur ce principe ?
Pas de réponse.
10 - SANTE
Au risque de mettre ce public en danger, l'accès aux soins des personnes handicapées reste un gros point noir, du fait de l'inaccessibilité des lieux de soins, du manque de formation du monde médical aux particularités du handicap et de reste à charge qu'elles ne peuvent assumer. Comment comptez-vous y remédier ?
Pas de réponse.